𝐁𝐀𝐒 𝐋𝐄𝐒 𝐌𝐀𝐒𝐐𝐔𝐄𝐒
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chapitre vingt —— S'excuser
« Le pardon est la plus grande forme d'amour. »

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Son téléphone affichait onze heures et demie lorsqu'Emilia quitta la bibliothèque de son quartier, son sac de cours rempli de livres. Tous portaient sur le même sujet : l'informatique. Depuis qu'elle avait trouvé cette série de nombres sur une des photos d'Adella, sur son ordinateur, elle tentait de le déchiffrer. Elle avait longuement réfléchi sur le sujet, avait tout d'abord pensé que c'étaient les coordonnées d'un lieu, mais non. La jeune fille s'était rapidement retrouvée bloquée face à cette piste. Si elle pouvait éviter de demander à ses camarades de classe des hypothèses, cela l'arrangerait, alors la voilà à prendre des livres en rapport avec l'informatique et les codes en général.

Emilia traversa rapidement les ruelles qui menaient jusqu'au collège. Elle prit tout son temps, observant avec ennui les différents quartiers et bâtiments. Depuis quatre ans maintenant, elle prenait toujours le même chemin pour aller à Kunugigaoka, et rien n'avait changé en quatre ans. Les mêmes paysages défilaient sous ses yeux, les habitants prenaient toujours les mêmes chemins et passaient toujours devant elle, le visage sérieux et les traits tirés. Aucune lueur n'animait leur regard terne d'adultes. Quelle était leur raison pour laquelle il se levait chaque matin ? Quel était leur but dans la vie ? Emilia ne parvenait pas à la deviner.

Malgré cette monotonie qui ne lui plaisait pas, Emilia aurait préféré la garder plutôt que de voir son train-train habituel changé. Son quotidien fut bouleversé le soir où Adella n'était pas rentrée, et où elle fut officiellement portée disparue. Ses parents restaient envahis par la tristesse et avaient abandonné tout espoir de revoir leur fille. Ils n'étaient plus là pour Emilia, qui à cette pensée, laissa échapper un gloussement. Avaient-ils été là un jour ? Adella était la seule personne à qui elle tenait réellement, alors elle ferait n'importe quoi pour la retrouver.

Emilia chassa rapidement tout ça de sa tête. Elle devait, pour l'instant, se concentrer pour déchiffrer la suite de nombres sur la photo. Et pour ça, elle allait avoir besoin d'aide, même si c'était évidemment à contrecœur.

Elle arriva finalement devant le bâtiment de la classe après avoir durement montée la colline pour le rejoindre. Emilia était déjà exténuée, et le plus dur allait arriver. Sans un bruit, elle rentra et écouta un instant la classe. L'heure était à la pause du midi, presque tous les élèves devaient se trouver en classe. Et à ce propos, l'estomac d'Emilia gronda. Elle n'avait rien pris à manger, pour cette fois, elle avait complètement oublié de se nourrir. Elle haussa finalement les épaules, se disant qu'elle sécherait une matière pour aller s'acheter à manger.

La jeune fille inspira profondément, se tint droite, regarda droit devant elle et ouvrit doucement la porte. Au début, peu de personnes firent attention à elle, ne se doutant pas de son apparition en classe. Mais, après quelques secondes à marcher en direction de sa place, les regards se rivèrent sur elle, surpris. Du coin de l'œil, Emilia aperçut Nagisa et Kaede l'observer, cette dernière avec un sourire aux lèvres. Il faudrait qu'Emilia pense à lui parler cette après-midi.

Sans un mot, la brunette s'assit à sa place, fit mine d'avoir toujours été là, et sortie le premier livre qui lui tomba sous la main. Alors qu'elle allait tranquillement débuter sa lecture, une voix qu'elle ne connaissait que trop bien l'interrompit immédiatement.

— Yo.

Le rythme cardiaque d'Emilia s'accéléra en un instant. Elle aurait préféré le croiser un peu plus tard dans la journée, car à cet instant, elle n'était pas encore prête mentalement à lui demander de l'aide et à s'excuser. Elle se retint de soupirer, et détourna son regard de son livre pour le planter dans celui de Karma, assis juste à côté d'elle. Bizarrement, elle ne saurait expliquer la raison, mais elle était heureuse de le retrouver, lui et son sourire sarcastique.

— Je trouve que t'as changé, t'as pas levé les yeux au ciel et tu ne m'as pas ignoré cette fois, s'étonna le garçon, un sourire en coin. T'es malade ? Ou alors c'est parce que je t'ai manquée ?

Emilia ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel cette fois. Manquer ? Et puis quoi encore ? Elle laissa planer un long silence, hésitant à répliquer. Elle désirait changer son aptitude, son caractère et redevenir une personne plus aimable, mais elle ne parvenait pas à savoir comment. Sa fierté et son ego étaient, en quelque sorte, une immense barrière à son objectif. Elle n'arrivait pas à trouver une réponse adéquate pour engager une conversation que deux camarades banals pourraient avoir.

— Woaw, je t'ai jamais vue aussi silencieuse de toute ma vie, en plus tu tires une de ces têtes quand t'es frustrée ! rit Karma, visiblement amusé de la situation. Tu t'es remise de ta défaite ? J'ai l'impression que tu y as réfléchis, je me trompe ?

— Je suis... enfin, tu sais, voilà quoi, bredouilla Emilia, qui essayait d'éviter ce mot à tout prix. Bref, t'as compris.

— Non, non, j'ai pas compris, tu pourrais être plus précise ?

Emilia jeta un regard noir à Karma. Il désirait vraiment qu'elle le dise pour le plaisir de la voir gênée et en galère. Enfin, il fallait bien passer par là un moment donné, alors elle fit taire la petite voix dans sa tête qui lui dictait d'arrêter cette conversation, et se lança :

— Je regrette de ne pas t'avoir... écouté, et de ne pas avoir pris cette arme de secours... Mais aussi, si tu ne me l'avais pas dit, je l'aurais prise et on aurait gagné.

— Ah mince, tu partais bien pourtant, soupira faussement Karma.

— Bon ok, j'aurais dû t'écouter, finit-elle simplement par dire. Je m'en veux un peu, parce que, pour une fois, c'est... de... ma faute si on a perdu.

— Attends, je prends juste mon téléphone, coupa Karma en le dégainant de sa poche. Du coup, tu veux bien le redire devant la caméra ?

— Arrête de rire, je suis très sérieuse et je prends sur moi ! J'aimerais... changer.

Il éclata de rire avant de ranger son téléphone, un grand sourire aux lèvres. Il reporta finalement toute son attention sur sa camarade, prit soudainement d'un immense sérieux qui ne lui ressemblait définitivement pas.

— Tu sais, en arrivant dans cette classe, j'ai moi-même eu beaucoup de mal à faire confiance à ces idiots. Mais j'ai changé, et maintenant, je sais que je peux compter sur eux.

— J'ai culpabilisé à cause de toi ! Pourquoi tu m'as dit que tu me faisais confiance ? Je suis sûre que ce n'était même pas vrai en plus, pour m'avoir laissé planté lorsque tu avais ordonné au groupe de monter aux arbres.

— Je sais que tu détestes perdre et que tu es très intelligente, ce n'était sûrement pas une petite blague qui allait te faire éliminer. Et puis, honnêtement, je ne sais même pas pourquoi je t'ai dit ça.

Les mots de Karma eurent le même effet qu'un coup de poignard. Emilia serra rageusement les mains, prise d'une immense colère. Elle le savait, il s'était juste joué d'elle, comme d'habitude. Comment avait-elle pu croire un instant que ce qu'il lui avait dit était vrai ? À cause de lui, elle avait perdu du temps à avoir des remords sur le fait qu'elle avait perdu sa confiance.

— C'est bien ce que je pensais, ce n'était pas vrai, murmura la jeune fille, les membres tremblants.

— Non. Ce que je veux dire, c'est que c'est... Je sais pas pourquoi, mais je te fais confiance, peu importe la situation. Donc l'autre jour, c'est sorti tout seul.

Emilia resta un instant muette de stupeur. Sa colère retomba aussitôt, et elle planta ses yeux verts dans ceux ambre de Karma. Alors que de multiples questions apparurent dans sa tête, Karma sortit de son sac un lait à la fraise, qu'il tendit à sa camarade :

— La prochaine fois, on les écrasera. Oh, et tiens, parce que je veux que ton estomac se taise.

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CHAPITRE 20 TERMINÉ
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