Chapitre 5 : L'annonce
Le roi en personne était en face d'Eliane, s'engouffrant dans l'habitacle et s'installa également sur une des impérieuses chaises qui se trouvait à l'opposé du bureau de la princesse. Il balaya rapidement ces cheveux d'un geste de main souple et rapide, posa ensuite ces yeux sur sa fille et comme la politesse l'exige elle le salua en premier :
- Bonjour votre majesté !
Voyant son expression énigmatique la princesse déglutit automatiquement songeant déjà à plusieurs sujets qu'il pourrait aborder avec elle. Eliane le savait très bien. Son père, le roi détestait tourner autour du pot. Il allait droit au but.
Et ce que la princesse redoutait le plus, c'était la question de « l'union héritière ». Ce mariage purement politique qui allait bientôt sceller son rôle d'héritière et lui arracher le peu bonheur qu'elle grappillait dans sa morne vie de royale !
- Eliane, vous rappelez-vous de la première alliance extérieure du royaume ?, lança le souverain sans prendre la peine de saluer sa fille.
La princesse Eliane ne fut pas le moins du monde choquée par son attitude ! Le contraire l'aurait même étonné, son père, le roi n'était pas très affectif. Elle lui répondit alors sur le même ton !
- J'ai été la première personne à l'approuver, alors, oui je m'en rappelle très bien père !
Et ce mot, ce mot, elle était obligée de le prononcer parce qu'elle s'adressait à son géniteur. Autrement, la princesse l'appellerait tout le temps « votre majesté ! » pour lui rappeler qu'elle ne le portait nullement dans son cœur et qu'il y avait un large fossé entre eux. Hélas...
- Très bien, après validation vous savez très bien qu'une invitation royale où les souverains des terres de l'ombre devaient venir à la capitale a aussi été authentifiée ! Je vous informe qu'elle est annulée.
La princesse haussa son arcade sourcilière gauche en signe d'incompréhension et se redressa sur son siège, et fixant le souverain avec dureté. Elle s'était débattue avec la cours, bec et ongles pour que cette alliance soit signée. Eliane n'était pas rancuneuse, et d'ailleurs elle n'avait trouvée nulle part l'histoire qui aurait fait séparer les royaumes élémentaires.
De toutes façon, plus personne ne le savait ! Cela faisait si longtemps qu'on ne retrouvait la vraie version de l'histoire nulle part. Que des vielles rumeurs transcrites dans des livres et qui encore, ont étés déformées au fil des années. On gardait juste ses vieilles rancunes et en tant que future souveraine, dès que la commission s'était faite et qu'elle avait longuement étudiée la chose, la princesse avait décidé de recréer des alliances avec tous les autres pays partageant pleinement l'initiative très intéressante du roi du royaume caché de l'ombre.
Et voilà que quand tout était signé et que les premiers contacts entre les deux nations allaient s'effectuer, le roi venait encore de lui annoncer qu'il y avait encore un problème. Quel était-il donc cette fois ? C'était lui qui n'approuvait pas particulièrement cette idée et puis de toute façon il était le roi. Qu'avait-t-il bien pu prendre comme décision cette fois ci ?
- Ne vous méprenez pas ma chère ! Cela ne m'est nullement dû, je n'en suis pas à l'origine.
- Alors, votre majesté ?, répliqua-t-elle acerbe et on ne peut plus mécontente.
Le roi fronça ses sourcils et lança un regard lourd à sa fille. Depuis quand Eliane avait de telles habitudes ? Elle savait qu'il n'était pas que son père. Et le roi ne s'était pas déplacé jusqu'ici pour se faire manquer de respect.
- Le royaume de l'ombre a été attaqué et rasé, quand vous aurez compris que votre attitude ne me sied guère, vous aurez le reste des informations !, asséna le souverain d'un ton dur à sa fille avant de sortir de la pièce le regard insondable.
La princesse se laissa tomber dans son siège en soupirant tout bas. Que venait-il de se passer ?
Elle venait de manquer de respect au roi. Non à son père, non à qui en fait ? Et il osait appeler cela du manque de respect ! Cet être inqualifiable qui la traitait comme un instrument politique ? La rage en elle monta en crescendo.
Un petit soupir ou un regard de travers et c'était pris comme du « manque de respect ». Et tout ça parce qu'elle avait décidé de se défaire de son masque impassible. Elle ne voulait même plus le remettre.
Ah ces acteurs de nobles !
La princesse Eliane savait pourquoi...
Elle voyait un peu ce que sa servante personnelle, Alice évitait et la situation ambigüe qu'elle lui avait cependant imposé. Une amitié royale ou une amitié empoisonnée. Au palais, les châtiments étaient impitoyables, et atroces ! Elle le savait et pourtant...
Le roi l'énervait, son géniteur l'irritait, la couronne la tourmentait, la cours l'agaçait !
Cette vie l'exaspérait !
La colère, l'irritation ou un mélange des deux se mit à bouillonner en elle !
Le temps qu'elle ferme les yeux, une larme rebelle bravi le portail de ses paupières, invitant ainsi ses semblables. La princesse était en colère, et face à son impuissance elle se mit à sangloter. Les larmes se mirent alors à sourdre de ses magnifiques prunelles ignées...
Elle baissa la tête et se mit à essayer de les contenir mais peine perdue. Ses tourments exposés avaient bien trop vite eu raison d'elle... Elle gardait depuis un bon moment et a fini par craquer. Qu'est-ce qu'elle détestait cette vie !
Après de lourds sanglots silencieux, l'héritière finit par se calmer. Eliane se remit les idées en place et avait pris sa décision. Elle n'allait pas s'excuser car elle avait toujours su ce à quoi se résumait son univers.
Et bien qu'elle ait accepté malgré tout de suivre le chemin imposé elle en avait marre de ses crises royales. Eliane. Fierra allait faire ce qu'on attendait d'elle, mais ne comptez pas sur elle pour tolérer que même le roi, son géniteur ne vienne lui marcher dessus, trépignant son abnégation !
Elle apprendrait tout d'elle-même lors du prochain conseil. Et elle n'en n'avait cure de ce qu'allait penser le monarque. Et puis après tout, à part sa rigueur qui l'amènerait à suivre son chemin de royale que pouvait-il lui faire d'autre ?
Ce fut-là, la première erreur d'Eliane Fierra de penser que sa position de future souveraine pouvait l'amener à tenir tête à son père, le roi.
L'héritière se concentra pour évacuer toute colère, ainsi, elle ferma les yeux, soupira faiblement puis abaissa ses paupières. Mais aussitôt fait qu'elle se mit à ressentir de suite quelque chose de beaucoup plus physique et de plus fort en elle.
Des picotements, une kyrielle des picotements qui parcouraient tous son corps, de ses épaules jusqu'au bout de ses pieds. On aurait dit des milliers d'aiguilles enflammées qui rudoyaient sa peau de l'intérieur. Et la sensation se faisait de plus en plus forte !
La princesse faillit presque céder au trouble mais se retint difficilement. Quand elle rouvrit les yeux les sensations provoquées par les milliers de picotements s'évanouirent brusquement. Elle fronça les sourcils et referma les yeux.
Et à ce moment-là, elle éprouva une sensation jusque-là inconnue !
De la chaleur, une immense chaleur imminente en elle qui lui donna soudainement l'impression qu'elle allait au bout d'un moment exploser. C'était à peine croyable ! La chaleur montait du bas de son ventre puis irradiait tout son corps lui compressant les poumons au passage et faisant perler de la sueur sur ses jambes fines et allongées.
Même son souffle était surchauffé cependant, quand elle ouvrit les yeux cette fois-ci, la sensation ne s'estompa point, au contraire elle se prolongea. La princesse se mit à se poser mille et une questions. De légères gouttes de sueur naquirent à la base de sa chevelure. La chaleur augmentait et elle se sentit cuire de l'intérieur.
Sa robe était devenue trop étouffante pour elle, l'héritière avait une envie poignante de se rafraîchir. La chaleur était à la limite du supportable.
Et puis d'un coup, les portes de la bibliothèque s'ouvrirent timidement, laissant entrer sa servante personnelle. Quand cette dernière vit l'état d'Eliane, elle accouru vers elle mais s'arrêta brusquement à un peu plus d'un mètre ! En effet, la chaleur ardente qui se dégageait de l'héritière semblait ne pas pouvoir sous forme brute s'échapper de son corps ! Comme si il y avait une barrière. Elle chutait alors faiblement et en s'évacuant d'elle affectait la température qui montait lentement.
Et la servante le sentait proprement, cette grande hausse de température qui émanait de sa maîtresse.
- Votre Altesse, vous... Je vais chercher de l'aide, balbutia-t-elle paniquée.
- Alice, s'il vous plaît, ne dites rien !, parvint à articuler l'héritière.
- Mais votre altesse, vous ! Je ne sais même pas ce qui vous arrive, il faut chercher de l'aide, insista quand même la servante.
- Alice s'il te plaît assied toi, la tutoya soudainement l'héritière et aussitôt l'interpelée n'eut d'autres choix que d'obtempérer devant l'insistance de la princesse.
Pour la servante, si quelqu'un entrait et interprétait mal la situation, s'en était finit d'elle. Mais la princesse souffrait devant elle et avait besoin d'aide. Et l'héritière ne semblait nullement vouloir qu'elle prévienne l'extérieur alors elle était la seule à pouvoir l'aider.
Lentement, Alice s'exécuta ne sachant pas trop où se mettre. La princesse leva son visage tout rouge et maltraité par la sueur et lui lança :
- Apporte-moi de l'eau fraîche s'il te plaît.
Aussitôt dit qu'Alice sauta pour aller s'exécuter.
Et la princesse envahie par toutes ses sensations inconnues ne sut plus quoi faire exactement. Elle avait juste chaud, très chaud et elle ne pouvait pas sortir comme cela !
Avant le retour de sa servante personnelle, elle quitta son bureau et alla s'assoir à même le sol. Quand cette dernière revint en courant vers elle, lui servant un verre d'eau frais, l'héritière sauta presque dessus. Elle vida goulûment le verre et en pris un autre.
Et quand elle entamant de moitié la carafe, elle s'arrêta enfin. La température était toujours la même mais au moins mentalement, elle se sentait plus apaisée. Sa servante personnelle se rapprocha alors d'elle nonobstant la chaleur mais maintenant quand même une certaine distance par précaution du protocole social.
La princesse releva alors enfin ses yeux tristes sur sa servante. À part mûre réflexion elle l'interpella alors, s'engageant dans une conversation détournée nonobstant son état :
- Alice peux-tu me donner ton âge s'il te plaît ?
Ce n'était ni le moment, ni l'endroit pour la traiter cordialement. Mais un peu interloquée la servante répondit quand même en baissant les yeux.
- Vingt-ans ma princesse !
- C'est très jeune !, plus grand que mon âge mais quand même très jeune.
Alice se retrouva alors gênée. Pourquoi l'héritière lui posait ce genre de questions ? Se demanda-t-elle. Ou voulait-elle en venir ? Cette dernière qui semblait peu à peu reprendre ses esprits se leva du sol et continua sur sa lancée d'une voix qu'elle voulait assurée :
- Tu es une servante et moi une princesse !
...
Le cœur d'Alice loupa un battement. L'héritière venait-elle vraiment de dire cela ? C'était aussi la seule amie que la servante se faisait au palais alors pourquoi ? Un court moment, Alice défaillit. Non mais qu'est-ce qu'elle s'était imaginée ?, se sermonna-t-elle intérieurement. Eliane. Fierra était une princesse, pas une amie de la basse-cour.
- Je viens de me rendre compte de quelque chose. Sa majesté le roi est passée avant toi !, poursuivit l'héritière appuyant théâtralement sur les mots « sa majesté ».
La servante se raidit d'un coup redoutant la fin de cette conversation...
- Il m'a annoncé qu'une décision importante que j'avais prise avait été annulée. Et juste pour une phrase sous l'emprise de la frustration, il veut que je me justifie...
Alice voulue arrêter sa princesse. Elle n'était pas autorisée à savoir tout cela mais la curiosité lui tiraillait les entrailles. Et bien que l'héritière vienne de lui rappeler sa classe sociale, le danger de la situation ne fit qu'augmenter cette envie irrépressible ressentie par la servante. Le terrain se faisait de plus en plus glissant mais là, elle devait écouter jusqu'au bout.
- Alice, je viens de réaliser que même si tu restes très ouverte avec moi, je te mets en danger imminent. Je n'ai pas le droit de faire ce que je fais. Je ne veux pas que tu sois contrainte. Tu risques beaucoup trop, tu risques ta vie et celle de ta famille. Et je ne souhaite nullement m'imposer par ma condition de princesse, s'engagea la princesse héritière.
- Je suis l'héritière mais la volonté des monarques passe malgré tout avant la mienne. Je ne saurai t'assurer une protection sûre. Alors si tu ne veux plus être ma servante personnelle car cette cordialité entre nous est interdite je te prie me le dire sur le champ !, couronna Eliane d'une voix qui se mettait à trembler un peu mais fixant posément sa servante personnelle.
Et là, Alice ne sut plus quoi dire. Elle était juste bloquée sur place comme une statue de glace ! Ce n'était pas, alors là pas du tout ce qui se passait dans son scénario à elle.
La princesse s'inquiétait pour elle. Décidément tous les nobles n'étaient pas les mêmes ! La princesse héritière, elle, était différente. Et dès le début, même si elle s'en méfiait un peu elle avait toujours été très honnête avec elle. Alice savait désormais qu'elle avait un cœur pur.
La sincérité transperçait facilement du voile des mots qu'Eliane avaient prononcés. Et malgré tout ce qu'elle risquait, Alice voulait être son amie, elle voulait épauler Eliane.
Evidemment, elle ne savait rien de ce qui se passait dans la vie des royaux mais la princesse héritière, elle, semblait porter un lourd fardeau sur ses frêles épaules. Elle était princesse héritière et future reine de cet immense pays !
Alice allait se jeter dans la gueule du loup. Alors, elle s'avança lentement vers la princesse la fixant droite dans les yeux, s'amusant avec le diable. Et quand elle commença, il n'y eu point de pose.
- Je suis votre servante personnelle, mais vous ne m'avez jamais traitée ainsi. Vous êtes ma future reine mais vous me considérez comme une amie... Vous vous êtes confiée à moi, je vous ai écouté et je sais maintenant qu'en dépit des apparences vous êtes une très bonne personne. Vous avez du sang de noble mais vous réfléchissez comme une personne humaine, et si on nous retirait tous ses statuts et obligations nous ne sommes que de simples jeunes filles et nous aurions le droit d'être de formidable. Vous êtes la première noble que j'apprécie réellement et j'aimerais bien faire comme si toutes ses restrictions n'existaient pas ! Cependant, je ne peux pas mais après avoir vue pareille sincérité en vous, je sais ce que je risque, je sais ce qui se passera si quelqu'un ouvre cette porte, mais même si c'est en coulisse, je veux être votre amie..., termina enfin Alice en enlaçant audacieusement sa future souveraine, oubliant toutes les restrictions.
De nouvelles larmes se mirent alors à sourdre des yeux de la princesse qui fondit encore répondant délicatement à l'étreinte de sa servante personnelle.
En ce moment précis, c'était simplement deux jeunes filles, deux amies qui signaient malgré tout un pacte d'amitié dans un monde bouleversé par les lois, la stature, l'injustice du rang social et une nature trop stricte !
Outre temps, la température de l'héritière avait chuté jusqu'à redevenir normale...
@erson
Enfin, c'était dur mais je l'ai fait. Le chapitre 05 est en ligne ! Et il était plutôt hard à écrire. Alors j'ai pu le poster même si je n'ai pas réussi à avoir les 10 com's. Mais c'est pas grave puisque je sais que vous me suivez en coulisse ! Mais ce serait vraiment super de vous manifester. Et surtout, dites-moi ce que vous en pensez ! Que pensez-vous de ce pacte d'amitié ? Une idée sur ses répercussions sur la vie des deux jeunes filles ?
Surtout, c'est une joie pour moi de recevoir vos réactions et n'hésitez pas à partager mon histoire sur tous les réseaux sociaux que vous connaissez !
Hey !
Avant de partir, n'oubliez pas la petite étoile en bas ! *
Bye les élémentaires !
@erson
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