I
🎶 G-eazy feat Charlie Puth, Sober
Il était très tard tout du moins très tôt quand Jonathan, avec beaucoup de difficulté dû à sa grande consommation d'alcool, introduisit la clé dans la porte d'entrée de la maison. Par chance sa mère avait le sommeil lourd ce qui n'était pas le cas de son petit frère. À coup sûr, il devrait user d'astuces pour que ce dernier ne le dénonce pas à leur mère. Pas que celle-ci allait lui faire quoi que ce soit mais elle était du genre à tout rapporter à son père. Ce dernier avait quitté la maison après une énième dispute à propos de ses maîtresses depuis déjà 4 ans mais sa mère espérait secrètement qu'il revienne. Lui, il était plutôt heureux qu'il soit parti car ils ne s'entendaient plus très bien.
Il avait arrêté d'idolâtrer son père quand il s'était rendu compte que ce dernier avait eu le culot de faire un enfant dans le dos de sa mère. Le pire c'était qu'il ne se sentait même pas coupable et le trouvait même légitime puisqu'il parlait de son enfant et de sa mère devant eux sans une once de considération pour leur sentiment surtout ceux de sa femme. Il avait appris à connaître sa petite soeur et avait du admettre que c'était une enfant adorable, la mère n'était qu'une autre victime des mensonges de son père. C'était dur de leur en vouloir, l'unique fautif de leur malheur à tous était cet homme qui se croyait tout puissant parce qu'il avait un bon job et qu'il ramenait de l'argent à la maison. Il ne comprenait pas pourquoi sa mère continuait de s'accrocher à l'idée qu'il revienne.
Comme Jonathan s'y attendait, son frère le toisait de son lit lorsqu'il pénétra dans leur chambre. À croire qu'il avait passé la nuit à l'attendre.
- Qu'est-ce que tu fais encore debout toi?
- Je pourrais te retourner la question, tu sais que maman n'aime pas quand tu restes tard dehors. Elle dit que ce n'est pas sûr. Et si tu étais tombé sur des malfaiteurs ?
Son petit frère aimait se prendre pour son père malgré son jeune âge. Du haut de ses 14 ans, il était tout le contraire de son frère. Élève travailleur avec toujours d'excellentes notes. Joueur de basse à ses heures, il avait toutes les caractéristiques de l'enfant modèle. Jonathan était plutôt fier de lui sauf quand celui-ci essayait de se prendre pour son père.
- Je n'étais pas seul David. Et si tu dormais? À ton âge ce n'est pas raisonnable de rester debout à cette heure. Tu es en pleine croissance, décréta le jeune homme en enlevant avec difficulté son t-shirt et son jeans.
La tâche s'avéra un peu compliqué puisqu'il avait oublié d'ôter ses bottes. Il se retrouva avec son jeans baissé jusqu'à ses pieds penché pour essayer d'enlever ses bottes. Mais ses lacets lui paraissaient comme une équation impossible à résoudre. David se pinça les lèvres pour essayer de ne pas rire devant le pathétique de la situation. Peine perdue, il finit par pouffer et essuya le regard noir de son grand frère. Finalement après ce qui semblait être une éternité, il réussi à se débarrasser de ses entraves et se laissa tomber sur son lit.
Le sommeil peina à venir comme souvent après une soirée très mouvementée. Son esprit se perdait dans les sensations grisantes qu'il avait éprouvé et n'arrêtait pas de jouer en boucle chaque petite seconde. Il s'était complètement lâché ce soir pour fêter la clôture de ses examens. Lui et ses amis maîtrisaient l'art de faire la fête dans les règles de l'art. Ses veines étaient saturées par de la bière à un tel point qu'il avait l'impression de ne plus faire partie de ce monde.
★★★★★
- Lève-toi Jonathan, il est midi passé.
Son petit frère ne reçut qu'un grognement comme réponse. Pour bien montrer ce qu'il en pensait, il enfouit sa tête sous les draps. Il avait pour but de comater durant toute la journée pour récupérer tous ces matins à se lever aux aurores pour aller à l'Université. De plus, il n'avait rien de prévu pour la journée alors à quoi bon se lever. De toute façon, quand la faim se fera sentir il sera obligé de se lever pour aller se restaurer.
- Manmi veut te parler, insista l'adolescent constatant son échec.
- Fous moi la paix David. T'as pas autre chose à faire ?
- Je t'aurais prévenu au moins. Manmi va être infernale, asséna David d'un petit ton sentencieux avant de s'en aller.
L'aîné de la fratrie poussa un soupir de soulagement avant de sombrer dans un sommeil de plomb. Il finit par émerger au milieu de l'après-midi. Il avait complètement décuvé mais son ventre criait famine. Il sortit du lit avec difficulté, enfila un short pour partir en quête de nourriture. La maison était silencieuse ce qui ne l'étonnait guère. Sa mère passait rarement ses après-midi à la maison. Après avoir préparé un truc à manger, elle se rendait chez l'une de ses amies pour bitcher sur ses autres amies. Et son petit frère devait être fourré avec son pote de toujours à jouer au basket sur le terrain pas très loin de leur maison.
Il aimait bien quand il était seul chez lui, la solitude ne l'avait jamais fait peur. Il adorait être entouré des gens qu'il aimait mais il aimait tout autant se retrouver seul. Beaucoup de ses amis avaient souvent du mal à comprendre que des fois il n'avait juste pas envie de voir leur tête.
Il trouva du riz au haricot vert sous un couvre-plat accompagné d'une sauce de morue à son plus grand bonheur. Il but un verre d'eau pour se désaltérer avant de s'attaquer à son plat. Il découvrit un morceau de papier sous son assiette et le lu. C'était un mot de sa mère qui lui demandait d'apporter une bannière de jeûne chez une des soeurs de son église, appellation courante entre les fidèles des églises chrétiennes de la place qui se considéraient comme une grande famille, où se tiendra le prochain service.
Il poussa un grognement de frustration car il avait prévu de retourner roupiller après son repas. Il soupçonnait qu'elle avait fait exprès car c'était une tâche que David aurait bien pu faire tout seul. Il se rassura en se disant qu'elle n'habitait pas vraiment très loin de chez lui. Il espérait sincèrement que Sr Rosalie ne le retiendra pas en otage comme elle en a l'habitude lorsqu'il la croise. Pas qu'elle était méchante au contraire et c'était là le problème. Fallait toujours qu'elle lui demande des nouvelles de toute sa famille, en prenant le soin d'énumérer chaque nom.
Quelques minutes plus tard, c'était avec la démarche d'un condamné marchant jusqu'à l'échafaud qu'il se rendit chez elle. Quelques minutes de marche et il se retrouva devant une maison basse qui datait du siècle passée. Ça avait été la maison d'enfance de Rosalie avant qu'elle n'en hérite à la mort de ses parents. Il pénétra sur la galerie puis frappa à la porte d'entrée. La maison était silencieuse l'obligeant à s'interroger sur la présence de personnes à l'intérieur.
Il frappa encore une fois avec hargne. Un son étouffé se fit attendre avant que la porte ne s'ouvre à la volée sur Daphnée, la fille de Rosalie. Elle avait à peu près son âge et ça lui arrivait de discuter avec elle mais ça n'allait jamais plus loin. Il la trouvait trop...bizarre. D'ailleurs, elle l'observa de la tête au pied visiblement de mauvaise humeur à en juger par sa moue.
- Pourquoi tu frappes comme ça ? Tu veux détruire cette maison? Demanda-t-elle d'une voix rauque assez inhabituelle.
Il fronça les sourcils interpellé par ce détail. Il prit le temps de la reluquer de la tête au pied puis s'arrêta sur ses yeux injectés de sang. Il se pencha vers elle et la renifla la faisant reculer. Elle le fusilla du regard pour son geste mais ne dit rien.
- C'est de la marijuana que je sens sur tes vêtements ? Tu fumes Daphnée? S'exclama-t-il d'une voix rendue aiguë par la surprise.
- Ça ne te regarde pas. Pourquoi t'es là ? Marmonna-t-elle en retroussant son nez dans un geste de dédain.
- Je dois remettre ça à ta mère.
En disant cela, il désigna la bannière qu'il tenait dans sa main. Elle sembla comprendre et perdit son air méfiant.
- Bien, bah donne la moi, elle n'est pas là.
Elle fit un geste pour la prendre mais il l'éloigna toujours sur le choc de sa découverte.
- Tu fumes vraiment ? Ta mère le sait?
Elle poussa un soupir d'exaspération en levant les yeux au ciel.
- Est-ce que moi je t'en pose des questions ? Bah non, parce que ta vie ne m'intéresse pas alors fait de même s'il te plaît. Donne moi ce truc et dégage !
- Ce n'est pas sensé détendre ce truc. Ça n'a pas trop l'air de marcher d'après ce que je vois. Je n'irai chez moi que quand tu auras répondu à mes questions.
Il savait qu'il était beaucoup trop intrusif mais il ne pouvait s'empêcher d'être intrigué. Daphnée était tout le package de la jeune fille de bonne famille que sa mère voudrait le voir fréquenter. Elle avait toujours eu de bonne notes à l'école, elle ne se mêlait jamais des affaires des autres, n'était jamais impliquée dans des affaires douteuses et allait à l'église tous les dimanches avec sa mère et son grand frère. Il ne lui connaissait pas beaucoup d'amis dans le quartier à part qu'elle traînait souvent avec ses cousins. Il l'avait toujours trouvé un peu garçon manqué mais à vrai dire il n'avait jamais remis en question ce style car ça lui allait. Il ne lui connaissait même pas de petit ami mais il supposait qu'elle en avait car il avait surpris une conversation avec un de ses cousins.
- Des questions ! Tu es de la police maintenant ? T'as pas autre chose à foutre comme aller te bourrer la gueule. Tu pues la bière à plein nez et tu oses faire le choqué pour de la marijuana.
- La bière, elle, est légale. Et je ne suis pas choqué d'ailleurs j'en ai déjà fumé et je n'ai pas du tout aimé la sensation. Alors je suis intrigué...
Elle se massa la tempe en soufflant exagérément avant de lui jetter un regard noir. Elle allait répliquer quelque chose de salé quand elle aperçut une de ses voisines les regarder avec intérêt par sa fenêtre. Une commère de première qu'elle s'ingéniait d'éviter à tout prix. Il ne manquerait plus que ça
- Je fume parce que ça m'aide à décompresser après les exams. Satisfait ? Maintenant donne-moi ce truc et va t-en!
Elle le happa entre ses mains avant de claquer la porte à son nez vivement. Jonathan resta debout à la regarder un bon moment un peu chamboulé par sa découverte. Daphnée fumait de l'herbe. C'était le genre d'information à vous casser tout un mythe. Ce n'était pas vraiment ce à quoi il s'attendait d'elle et à dire vrai l'apprendre la rendait soudain très intéressante à ses yeux. Pas dans le sens où elle l'attirait mais désormais elle n'était plus cette idéale qu'on idolâtrait de loin sans oser l'approcher. Maintenant, elle lui apparaissait plus humaine. C'était ce genre de petite fêlure qu'il adorait trouver chez les gens, ce petit détail qui disait qu'elle était qu'humaine.
Il finit par tourner les talons et rencontra les yeux perçants de Magalie qui l'observait sans aucune discrétion à sa fenêtre. Il lui sourit d'une air mielleux avant de lui faire un signe de la main. Elle esquissa un sourire crispé avant de disparaitre derrière son rideau. Comme il n'était pas loin de chez Steven, l'un de ses meilleurs potes et accessoirement cousin de Daphnée , il décida de faire un saut chez lui. Ce qu'il y avait de bien avec son quartier c'est que la plupart des habitants avaient des liens de parenté où se connaissaient depuis toujours. C'était une localité tranquille dans les limites de Pétion-Ville. Le seul truc qu'il lui reprochait c'était l'état de ses routes.
La maison de Steven faisait partie des plus immenses du quartier puisque son père était un cadre important de l'ONA. Il sonna à la barrière puis attendit quelques secondes avant qu'elle ne s'ouvre sur le visage de Steven. Pas très grand mais pourtant ce dernier possédait un charme indéniable qui faisait que les filles se battaient pour l'avoir. Ce petit détail le rendait un brin prétentieux mais Jonathan l'admirait quand même.
- Hey, t'as fini de décuver? Il paraît qu'avec les potes de ta fac tu as fait la fête jusqu'au petit matin.
Jonathan souffla d'un air blasé. Il n'avait même pas besoin de se creuser la tête pour savoir qui avait cafté.
- Laisse moi deviner, ma mère a raconté à la tienne.
Ce n'était même pas une question, leurs mères était amies depuis leur enfance et cette amitié perdurait jusqu'à aujourd'hui. Elles étaient tout le temps fourrées l'une chez l'autre pour leur activité préférée "bitcher" .
- Elles papotent dans le salon. Allez entre, j'allais mater quelques épisodes de The magicians sur Netflix.
- Quelle saison? Demanda Jonathan alors qu'il pénétrait dans l'immense cour de la maison.
- La première, j'ai plus rien à regarder alors je regarde les anciennes saisons de mes séries en attendant les prochaines saisons. Christian est là aussi, il a apporté le reste de la bouteille de la soirée de samedi.
Bien qu'il n'avait pas totalement éliminé l'alcool contenu dans son sang, il savait qu'il allait encore se mettre à l'envers ce soir. Il ne résistait jamais à quelques verres d'alcool. Il ne se considérait pas comme dépendant, disons juste que pour lui il était inconcevable de s'amuser sans avoir avalé quelques gorgées de rhum. Un verre ou deux lui était suffisant.
On pouvait accéder à la chambre de Steven sans passer à l'intérieur de la maison ce qui était très pratique quand il rentrait de soirée ou quand il amenait ses petites amies. Cet aménagement a été fait en début de l'année après moult supplique de Steven auprès de sa mère qui lui cédait tout au grand dam de son père. Il trouva Christian affalé par terre le nez collé à son téléphone, un verre à moitié rempli posé par terre près de lui. Contrairement à Steven, il n'avait pas grandi avec Christian ce dernier avait emménagé dans leur quartier il y 3 ans de cela et comme il était voisin avec Steven, il avait fini par l'avoir dans son groupe d'amis. Il l'appréciait vraiment beaucoup car Christian était quelqu'un de particulièrement calme qui se fâchait rarement et ils avaient de nombreux points en commun comme leur passion pour le basket. Leurs autres potes étaient plus fan de foot.
- Salut mec.
Ils se firent un check avant que Jonathan ne se laissa tomber sur le lit de Steven. La chambre de leur ami était immense et servait souvent de quartier général avant une soirée et l'attraction principale était sans doute la PS4 qui leur faisait de l'oeil posé tranquillement sur un meuble en bois.
- Faut qu'on fasse un truc pour ces vacances sinon ça va être vite chiant, décréta leur hôte en s'asseyant à son tour.
Il a toujours eu la bougeotte, enfant hyperactif, il passait souvent la moitié de ses vacances en camp d'été pour donner un peu de répit à sa mère. Maintenant, il s'occupait comme il pouvait. L'année dernière, il avait travaillé avec sa mère pour l'aider dans la préparation de ses produits de beauté faites à base de produits naturels. Il avait aimé l'expérience mais les gestes étaient devenus mécaniques à force de suivre tout le temps la même recette. Il voulait de la nouveauté et à eux trois ils n'étaient jamais à court d'idées.
- Tu te souviens de ce projet qu'on avait il y a deux ans, barbecue tous les vendredis avec bière ? À l'époque, il nous manquait beaucoup de choses pour le mettre à exécution notamment le fond nécessaire mais je crois que cette fois-ci, ça marchera. J'ai des économies et si je me souviens bien, Jonathan toi aussi t'as mis du fric de côté après ton contrat de deux mois en logistique. On n'est pas trop fauché alors au lieu de flamber ce fric, pourquoi ne pas l'investir dans quelque chose de fun?
Steven lui servit un verre de rhum, la mine intéressée.
- Ah ouais! Ça marcherait grave, de la musique, de la nourriture et de l'alcool, tout ce qu'il faut pour une bonne ambiance. Je vais nous faire une pub monstre, renchérit Christian en laissant tomber son téléphone.
Enthousiaste, Steven s'exclama.
- Alors on le fait...Mais on a un problème de taille, nos talent culinaires ne sont pas au top.
- Bah Daphné pourrait nous donner un coup de main non?
Jonathan protesta, pas d'accord avec l'affirmation. Rien que penser au fait de côtoyer la jeune femme lui donnait des sueurs froides.
- Moi je sais faire la cuisine, je vous rappelle que ma mère m'a tout appris à défaut de ne pas avoir de fille. Et vous savez comment elle cuisine ma mère...
- Comme une déesse, termina Christian avec un sourire rêveur sur les lèvres en pensant aux délicieux légumes de crabe de la mère de son ami.
- On le sait que t'es le roi des cuistots mais ma cousine, elle, a suivi des cours de cuisine et toi non. Avoir une experte ne serait pas de trop, je te rappelle que l'attraction principale sera la cuisine.
À chaque fois qu'ils évoquaient la cousine de son ami, il se sentit étrange comme si elle était devenue un secret qu'il ne fallait pas évoquer. Il secoua la tête pour la sortir de sa tête avant de se concentrer sur la conversation qui évoquait la logistique de leur projet. Il ne fallait surtout pas qu'il laisse cette fille s'imposer dans sa tête. Surtout pas! Il se connaissait assez pour savoir que ce soudain intérêt pouvait devenir quelque chose de plus s'il se laissait faire et ça ne devait surtout pas arriver. Cette fille était bien trop compliquée et des complications, il n'en voulait pas.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen2U.Com