𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟓𝟓
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C H A P I T R E 5 5
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— tw : ×××
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— C’est tellement flippant…
Cela doit faire la sixième fois qu’Edward répète cette phrase. Je suis tentée de lever les yeux au ciel mais je dois avouer que ma lampe torche glisse dans ma paume tant celle-ci est moite.
L’obscurité de la nuit est presque dévorante.
Aucun n’a hésité lorsque nous leur avons communiqué l’adresse dévoilée par Devi. Ils se sont naturellement portés volontaires pour m’aider à fouiller ledit lieu.
— Petite question…
— Edward, si tu ne la boucles pas, je vais commettre un massacre, gronde Bosuard, la main sur sa lampe torche.
Rivant le faisceau lumineux sur les arbres alentour, nous tentons tant bien que mal de trouver notre chemin. Mes dents claquent les unes contre les autres à mesure que je m’enfonce dans les bois.
— Non mais sérieusement, insiste Edward. On est combien, là ?
— Cinq.
La voix de Dan est relativement douce. Ce garçon conserve toujours le même ton serein, qu’importe les circonstances.
Et le fait que nous nous enfoncions dans une forêt mystérieuse, cherchant à atteindre un lieu où trois femmes ont peut-être été rendues captives ne semble pas le toucher plus que cela.
Cependant, des détails ne trompent pas. Comme sa mâchoire se contractant de rage à chaque mention du corps tuméfié de son amie.
— Et donc, parmi les cinq génies que nous sommes…
— Quatre, corrige Bosuard. Navrée de te l’apprendre, mon chou, mais tu es demeuré.
— Hé !
Edward, qui mène la marche, se fige dans ses pas. Se retournant vers la femme, il la considère d’un air outré.
— Ça se fait pas de parler comme ça à (T/P) !
— Je ne parlais pas de…
Bosuard ne prend même pas la peine de finir, levant les yeux au ciel.
D’ordinaire, je crois que j’éclaterai de rire face à son air désabusé. Mais pas aujourd’hui. Mon ventre se retourne tandis que mon cœur bat si fort qu’il couvrirait presque le bruit de leur conversation.
Soudain, il fait plus chaud. Une étoffe caresse mon corps en se posant sur mes épaules.
Shota vient de me mettre son manteau.
— Je n’aime pas te voir frissonner, chuchote-t-il en m’emboitant le pas.
Une légère chaleur cuit mon visage et je souris doucement.
— Je disais, reprend Edward, parmi nous cinq, aucun n’a voulu appeler la police ? Je sais bien que des soupçons se portent sur nous quant à une enquête pour meurtre et que avoir de tels indices ne seraient pas du plus bel effet pour être disculpé…
— Bah voilà, tu l’as, ta réponse, grommelle Dan derrière moi.
— Mais on parle d’un potentiel tueur en série, les enfants ! C’est grave, là !
La main libre de Shota se pose dans le bas de mon dos. Je sens un air pur gonfler mes poumons à ce contact et ne peut m’empêcher de réaliser que la peur m’alourdit moins, maintenant.
Je me sens toujours plus forte, lorsqu’il est là.
— Navrée, Edward, je déclare simplement en continuant de marcher, prétendant ne pas avoir vu le cadavre d’oiseau sur le sol qu’a illuminé la lampe torche de mon amie.
Un bien mauvais présage.
— Ne le sois pas, intervient aussitôt Shota. D’après Devi, il n’y avait aucune autre fille et leur ravisseur ne compte pas revenir. Elle n’est même pas sûre qu’elle était ici alors si cela se trouve, nous ne craignons rien.
Je peux comprendre les inquiétudes d’Edward.
Un châlet tombant en ruines, plantés au beau milieu d’une forêt, non loin de la route où ont été retrouvées Devi et Fawzia ? Un lieu où la dépouille d’une autre femme a été découverte ?
Bien sûr que nous sommes au bon endroit. Le nier ne nous sauvera pas.
— Je rejoins Edward sur un point. Si jamais on le trouve, cet endroit, qu’est-ce qu’on fera ? Si on ne peut pas appeler la police ?
Bosuard, accompagnant ses paroles, s’arrête de marcher. Nous l'imitons, réalisant la raison de cette brutale interruption.
Le faisceau puissant de la lampe d’Edward illumine la façade lézardée d’une bicoque en ruines. Je frissonne en voyant les tuiles manquantes du toit, le lierre grimpant où bien la terre retournée, tout autour de l’endroit.
Plus personne ne dit rien. Nous nous contentons d’observer le sinistre spectacle des horreurs.
Cela dure un moment. Ce silence austère où nous nous retrouvons figés. Il s’étend à la manière du corps écaillé d’un serpent venimeux. Il s’enroule autour de nous, pressant notre traché. Nous nous laissons nous étouffer dans cette étreinte brutale.
Jusqu’au répit. Shota ose parler :
— Et bien, nous allons nous assurer que cela s’est produit ici, récolter les preuves qui nous aideront à devancer la police puis la contacter anonymement pour feindre d’être un minimum responsables.
Un soupir le prend. Il me dépasse, marchant vers l’entrée de la masure.
— Quand il faut y aller…
☆
Poussant ma joue de ma langue, je l’observe pénétrer le théâtre de la terreur. Ma main moite glissant sur la lampe torche, je pousse un soupir similaire au sien.
La légèreté qui s’était emparée de moi en sentant sa main sur le bas de mon dos s’est à présent entièrement dissipée.
Cependant, je me force à l’imiter.
Ignorant mon instinct qui me hurle de fuir aussi loin que possible. Car je dois le faire.
Pour Fawzia. Pour Devi.
— Vous trouvez quelque chose ? résonne la voix de Dan, depuis le rez-de-chaussée.
Médusée, je ne réponds pas.
Je ne sais pas trop à quoi je m’attendais, en descendant au sous-sol. Je crois que je savais que quelques dessins sordides s’articuleraient à mes yeux.
Cependant rien ne pouvait me préparer à me retrouver effectivement en face d’eux.
— De la confiture moisie dans le frigo ! répond Edward.
— On s’en tamponne de ça, réagit aussitôt Bosuard. Moi j’ai trouvé un seau rempli de pisse croupi.
— Putain, on est chez un dandy !
Je ne réponds pas, mes doigts tremblant.
— Chérie ?
La voix douce de Shota résonne dans mon dos. Je ne trouve pas la force de me retourner.
Autour de moi, aucune lumière n’existe. Seule ma lampe torche apporte quelque clarté à la scène lugubre qu’est cette cave. Cependant même un aveugle pourrait sentir les relents de moisissures, déchets humains et sang qui caractérise ce lieu.
Mon nez me pique tant le parfum est fort. Mais il n’est rien comparé à la vue qui s’offre à moi.
— Oh, (T/P)...
J’entends la compassion dans la voix de Shota. Mais cela ne parvient pas à apaiser mon coeur.
— Je suis navré que tu sois celle qui ai découvert cela.
Mes jambes tremblent mais pour rien au monde je ne m’asseyerais sur la chaise rongée au mittes bordant la table de bois humide où repose une lampe à huile cassée.
Je devine avec horreur que c’est l’endroit où l’esprit malade responsable de ces enlèvements s’asseyait pour observer ses victimes.
Car la chaise est orientée de sorte à faire face à un mur. Un mur duquel sortent deux chaînes se terminant en bracelets de métal, séparés d’un mètre l’un de l’autre.
La distance idéale pour attacher une femme de la carrure de Fawzia ou Devi.
— Elle… Elle était là.
Mon regard glisse sur le matelas au sol, traversé de tâches. J’y devine un mélange de sueur, sang, larmes et peut-être même urine.
Je ne vois aucun pot-de-chambre, à côté.
— (T/P), je peux te jurer que je mettrais tout en œuvre pour qu’elles obtiennent justice.
J’acquiesce, les yeux humides. Seulement j’ai beau lutter, je ne parviens pas à vaincre la larme qui coule soudain sur ma joue.
A côté de moi, le noiraud me regarde. Je peux sentir la douceur de ses iris sur moi. Sa main se lève. Il s’apprête à essuyer la larme qui coule sur ma joue.
Mais sa main se fige soudain. Ses sourcils se froncent.
Il a compris.
— Ce n’est pas que le fait de voir où elle était durant tout ce temps, n’est-ce pas ? demande-t-il d’une voix rauque.
Je frissonne violemment.
— (T/P)... Qu’il y a-t-il d’autre ?
Un hoquet me prend.
— Shota… Regarde autour de toi.
Ne comprenant où je veux en venir, il fronce les sourcils. Mais il obtempère aussitôt. La lampe torche levée à hauteur de visage, il analyse les alentours.
— Rien ne te choque, dans cette pièce ?
Sa tête oscille de gauche à droite tandis qu’il froisse son menton, ne saisissant pas où je veux en venir.
Soudain, ses yeux s’écarquillent. Il se fige, regardant le matelas au sol. Chacun de ses traits retombe et un éclat d’effroi traverse son regard.
Il se tourne vers moi. Une autre larme roule sur ma joue.
— Oh, ce n’est pas vrai…
Ma gorge se serre. Le désarroi qui se fait entendre dans la voix de Shota fait écho à ce que j’ai ressenti, en découvrant cette salle.
Et il le formule tout haut :
— Nous savons qui est le coupable…
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j'espère que ce
chapitre vous aura plu !
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