Chapitre Alfen : Me laisseras-tu une place dans ton cœur ?
Je me penchai en arrière dans mon fauteuil, massant mes épaules afin de chasser la tension qui s'y était installée. Je repassai une mèche de mes cheveux argentés derrière mon oreille, devenu un tic de ma part à force de répéter ce geste. Je posai mon stylo, épuisé par la longue journée. Mon téléphone vibra, je l'ignorai et continuai de me concentrer sur les monticules de paperasse qui m'attendaient.
Celui-ci vibra à nouveau. Encore. Toujours. À chaque fois. Sûrement eux.
Je retournai l'appareil, voyant les messages défiler les uns à la suite des autres. Je fronçai les sourcils avant d'en écrire un seul à mon tour et de l'envoyer à toutes les personnes qui me harcelaient.
Cela ne sembla pas les dissuader puisqu'un appel se lança. Je raccrochai au nez de mon interlocuteur, bloquant son numéro. Un autre message cependant attira mon attention parmi le flot.
S'il te plait, réponds-moi.
Je poussai un soupir avant d'appeler l'expéditeur de ce message.
« Alfen !!, s'exclama une voix féminine au téléphone, comment va mon frère préféré ??
- Comme d'habitude. Allons droit au but, pourquoi est-ce que je reçois autant de messages ? Qu'est-ce qu'ils me veulent encore ?, interrompis-je d'un ton froid et peu cordial.
- Oh Alfen, je suis désolée... Je... Comment te dire... Ils savent que toi et moi restons en lien donc ils me harcèlent pour que tu répondes. Ils veulent te présenter un nouveau compagnon... J'ai essayé de les en dissuader mais... Alfen ? », continua la voix avant de se rendre compte du silence de mort qui régnait de l'autre côté.
À la mention du mot « compagnon », je m'étais renfermé, mes jointures devenues blanches à force de serrer mes poings, mes mains tremblaient de rage et je demandai à ma sœur d'une voix calme, toute colère contenue.
« Quand ont-ils décidé ça ?
- Alfen, je, calme-toi s'il te plaît, me supplia-t-elle.
- Je suis parfaitement calme, affirmai-je.
- Non, je te connais. Je sais que tu es en colère et je le comprends parfaitement mais, tenta-t-elle.
- C'est bon Alina, la coupai-je, je m'en charge, je ferai en sorte qu'ils ne t'embêtent plus également.
- D'accord..., soupira-t-elle, prends soin de toi en tout cas.
- Merci, toi aussi », la remerciai-je avant de mettre fin à l'appel.
Je posai le téléphone et me massai l'arête du nez d'épuisement ainsi que de dépit, un autre de mes tics. Je marmonnai quelques insultes silencieuses à l'encontre de ces vieux schnocks pénibles.
L'appareil se remit à vibrer une énième fois. Je jetai un coup d'œil à mon interlocuteur.
Tiens, en parlant du loup...
J'inspirai un bon coup et le saisis avant de décrocher.
« Meilo.
- Alfen !! Quand allais-tu répondre ???, s'emporta l'autre voix au bout du fil.
- Jamais. Si ce n'était que le harcèlement incessant de ma propre famille était aussi insupportable, soupirai-je, dépité.
- Tu exagères ! Nous pensions à toi, c'est tout ! Nous t'avons trouvé un nouveau compagnon ! Tu devrais venir le rencontrer, il est de bonne famille et bien éduqué, ronronna l'autre personne.
- Mania*... C'est bien aimable mais je n'ai pas besoin de votre aide. De plus, je n'ai pas envie d'être en couple, tranchai-je.
- Alfen, tu n'irais pas contre la volonté de ta famille ?, intimida-t-elle.
- Est-ce une menace ?
- À toi d'en décider, susurra-t-elle.
- Dois-je te rappeler ce qui s'est passé avec Doli ? », grinçai-je entre mes dents.
Un silence se fit entendre à l'autre bout du fil avant que l'autre personne ne soupire de mécontentement.
« C'était un accident mon fils, tu sais très bien que ce n'est pas ce que nous voulions, tenta-t-elle de mauvaise foi.
- Oh bien sûr, me moquai-je, le ton ironique, je comprends, vous n'y êtes pour rien mes pauvres. Ce n'est pas comme si vous l'aviez poussé-
- Alfen !, s'emporta l'autre personne, c'est un sujet clos ! Donc, si tu ne veux pas que ta sœur se retrouve privée de ses études, il va falloir que tu viennes !
- Est-ce du chantage ????, m'écriai-je, consterné par cette attitude.
- À toi d'en décider ».
Mon cerveau se mit à tourner à toute allure, réfléchissant à une solution.
« Je ne peux pas, mentis-je, je suis déjà en couple. Avec quelqu'un. Je ne voulais pas que vous le sachiez donc je n'ai rien dit »
La voix se tut pendant un moment, me demandant si elle avait cru à mon mensonge.
« Vraiment ?, reprit-elle, incertaine.
- Vraiment, affirmai-je tout en m'enfonçant de plus en plus dans le mensonge.
- Oh... Présente-le nous dans ce cas ! J'espère qu'il est de bonne famille ! Tu as intérêt à venir avec cette personne au dîner dans deux jours. Hâte de le rencontrer !, gazouilla-t-elle.
- Oui, c'est cela, bonne soirée », terminai-je sèchement en raccrochant brusquement.
J'envoyai valser mon téléphone sur la table de rage et de désespoir.
Que devais-je faire ? Comment résoudre le problème dans lequel je m'étais enferré ?
Je restai à fixer le plafond, ignorant les montagnes de paperasse qui m'attendaient, cherchant toutes les solutions possibles et inimaginables qui me passaient par la tête.
Un bruit contre la porte me sortit de mes pensées et celle-ci s'ouvrit sur un jeune homme hésitant.
« Excusez-moi... désolé de vous déranger Monsieur Desrel, Soliès m'a demandé de vous apporter ces documents... Je suis désolé si je vous dérange..., s'excusa-t-il gêné et penaud, remettant une mèche de ses cheveux blonds derrière son oreille d'un geste nerveux.
- Solène ? Solène Delis, c'est bien ça ?, m'enquis-je, l'observant d'un œil intéressé.
- Oui, c'est bien moi », confirma-t-il en hochant la tête.
En l'apercevant, une idée me traversa l'esprit. Je lui fis un geste de la main pour se rapprocher de mon bureau, ce qu'il fit.
« Monsieur Delis, est-ce que ça vous intéresserait de faire des heures supplémentaires ?, lui proposai-je.
- C'est-à-dire ?, fit-il en fronçant les sourcils, d'un air méfiant.
- Je vous payerai le quadruple de ce que vous gagnez en ce moment, m'explicitai-je.
- Oh..., lâcha-t-il, ses yeux s'agrandissant après avoir calculé le montant total.
- Bien sûr, ces heures supplémentaires sont spéciales..., soupirai-je.
- Ah oui ? En quoi le sont-elles ?, demanda-t-il, soupçonneux.
- J'aimerais... que vous jouiez le rôle de mon fiancé », avouai-je.
Un long silence de plusieurs secondes s'écoula avant qu'il ne lâche :
« Pardon ?
- Vous m'avez bien compris Monsieur Delis... J'ai des... problèmes personnels de ce côté-là. Mes employés me connaissent trop bien et sont connus de ma famille. Vous êtes ma seule option. Si vous refusez de m'aider, je comprendrais ceci dit et-
- J'accepte, à une condition, m'interrompit-il.
- Laquelle ?, interrogeai-je, curieux qu'il ait accepté.
- Je ne veux pas être touché... Même pas pour me prendre la main... », murmura-t-il, tout en baissant les yeux d'un air embarrassé.
Mon visage se fit plus doux à ces mots. Tout comme Doli, il avait certainement vécu une vie difficile.
« D'accord, agréai-je, je ne vous toucherai pas sans votre consentement »
Il sourit doucement à ma réponse et acquiesça légèrement.
Je me contentai alors de sortir une feuille et d'écrire un contrat entre nous qu'il signa rapidement.
Alors qu'il avait déposé les documents sur mon bureau et qu'il commençait à se diriger vers la porte, je l'interpelai :
« Seriez-vous libre ce soir pour un dîner ? Histoire de faire connaissance ?
- Oh..., fit-il, pensif, avant de sourire tendrement, pourquoi pas ?
- Vers quelle heure seriez-vous libre ?
- Vers 18h. Je vous attendrai sur le parking », déclara-t-il en rougissant avant de s'empresser de quitter la pièce à toute vitesse.
« Mignon », pensai-je en le voyant fuir, le rouge sur ses joues apparent.
Je secouai la tête pour chasser ces drôles d'idées et me centrai sur mon travail, mon esprit parfois s'égarant sur le choix du restaurant de ce soir.
Ellipse
Je poussai un long soupir de lassitude. Je rejetai la tête en arrière, me calant dans mon fauteuil, l'épuisement me faisant papillonner des yeux et jetai alors un coup d'œil à ma montre digitale avant de me rendre compte que j'étais terriblement en retard.
18h15
Oh. Par. Clopélia !
Je rangeai mes affaires sous le coup de la panique, resserrai ma cravate et attrapai ma veste sous le bras avec les papiers de la voiture.
Je descendis en coup de vent devant les airs surpris et ahuris de mes employés.
« Ben dites donc, il est pressé le patron aujourd'hui », lâcha l'un d'entre eux au détour d'un couloir.
J'arrivai ainsi, légèrement essoufflé, sur le parking et trouvai le blond, debout, esseulé, les cheveux flottant doucement au vent. Un air presque féérique l'enveloppait, lui donnant une sorte d'auréole divine dans le soleil couchant.
Mon cœur se mit à battre à toute vitesse devant cette vision.
Était-ce donc ça l'amour ?
Je me ressaisis et me rapprochai du blond, l'appelant :
« Mes excuses pour le retard.
- Oh..., fit-il en se tournant dans ma direction, ce n'est pas grave, je viens juste d'arriver aussi.
- Oh et bien... dans ce cas, voulez-vous qu'on y aille ?
- Oui, allons-y », accorda-t-il en me suivant vers ma voiture.
Alors que nous nous installions, je lui posai une question :
« Avez-vous des préférences en matière de restaurant ?
- Oh euh... et bien... je mange de tout en soi. Donc non. », murmura-t-il en souriant poliment.
Bon... Heureusement que j'avais prévu un plan B.
Quelques heures plus tôt
Je composai un numéro et lançai l'appel, espérant qu'il répondrait. La personne décrocha et je me présentai avant même de lui laisser le temps de parler :
« Meilo Soliès, puis-je vous parler un instant ?
- Patron ??? Euh enfin euh, oui, que puis-je faire pour vous ?, répondit la voix interloquée de mon interlocuteur.
- Hum... s'il vous plaît, ne posez pas de questions gênantes, mais j'aimerais savoir si Monsieur Delis avait des préférences en matière de restaurant et de nourriture, m'enquis-je en raclant ma gorge de gêne.
- ... Patron... est-ce que vous draguez Solène ?, me charria mon employé.
- HUM. J'avais dit pas de questions gênantes et ce n'est pas exactement ça. Alors ?, repris-je en devenant rouge d'embarras.
- Ça me paraissait juste tellement évident..., grommela l'autre homme avant de se reprendre, eh bien oui, je sais qu'il souhaite aller au restaurant « L'Amour rêveur », situé pas loin du bar « Le poulet somnolent »1, il me l'a avoué l'autre jour quand nous discutions. C'est un restaurant parfait pour les couples en plus ! Toutes mes félicitations boss, appelez-moi pour votre mariage !
- Là n'est pas le sujet, me mis-je à marmonner, rougissant de plus en plus, merci de votre coopération Soliès.
- Oh patron, attendez avant de raccrocher, reprit celui-ci brusquement, Solène adore les desserts, surtout les pâtisseries.
- Hum, merci pour l'information, remerciai-je.
- Je vous en prie. Et... s'il vous plaît... prenez soin de lui alors..., me murmura-t-il d'une voix suppliante.
- Oui... J'ai cru comprendre, soupirai-je, merci sinon et passez une excellente soirée »
Je raccrochai ainsi rapidement et fixai le vide pendant quelques secondes d'un air absent, avant de réserver le restaurant et de me remettre à travailler.
Dans le présent
Je garai la voiture avant d'en descendre et de nous diriger vers le restaurant. Un silence gênant prit place entre nous alors que nous nous installions.
« Je..., commença le blond hésitant, comment saviez-vous que j'avais envie de tester ce restaurant ?
- J'ai des contacts, répondis-je du tac au tac.
- Je vois... Soliès m'a vendu..., ronchonna le jeune cynérien.
- Y a-t-il quelque chose que vous souhaiteriez ?, m'enquis-je en ignorant ses bougonnements qui le rendaient adorable.
- Hmm, je regarde le menu », me répondit-il en parcourant la carte du restaurant.
Pour ma part, j'avais déjà choisi mon plat et je me contentai de l'observer d'un air souriant.
« Nous devrions nous tutoyer, ce serait plus simple non ?, proposai-je soudainement.
- En effet... si vous le souhaitez..., hésita Solène.
- Appelle-moi Alfen, Solène », soufflai-je doucement au blond.
Une certaine rougeur s'accentua sur ses joues et il cacha son visage de manière timide derrière la carte, le rendant encore plus mignon à mes yeux.
« Excusez-moi, interrompit un serveur, c'est bien ici le flan à la framboise ?
- Oui, pour le jeune homme, fis-je en désignant Solène d'un geste de la main.
- Bon appétit Monsieur », déclara alors le serveur en déposant une assiette devant mon compagnon de soirée avant de partir.
Celui-ci posa sa carte et leva la tête vers moi d'un air confus.
« C'est pour moi ?, demanda-t-il d'une petite voix timide.
- Bien sûr. J'ai appris que tu aimais les pâtisseries alors je t'en offre une, souris-je tendrement.
- Oh merci », me remercia-t-il sincèrement, des étoiles dans les yeux et un sourire heureux sur le visage s'accentuant au fur et à mesure qu'il le savourait.
Le reste du dîner se déroula agréablement, réussissant à faire sortir le blond de son mutisme, le voyant se détendre tout au long du repas. Celui-ci se termina d'une manière charmante, presque euphorique, car après avoir bu un ou deux verres de vin, Solène se mettait à rire à la moindre de mes plaisanteries, toute timidité envolée.
« Je devrais te ramener Solène, conseillai-je en lui tendant le bras pour qu'il s'appuie sur moi, souhaitant respecter notre accord.
- Non, non. J'ai envie de marcher un peu. Est-ce qu'on pourrait se promener dans le parc plutôt ?, me demanda-t-il en venant s'appesantir sur moi.
- Es-tu sûr que tu n'es pas trop ivre ?
- Non, non, seulement un peu. J'ai besoin de prendre un peu l'air pour aller mieux. Puis, je n'ai pas mon surprotecteur de frère sur le dos donc j'en profite, rit-il comme si c'était la chose la plus drôle au monde.
- Comme tu voudras Solène », souris-je tout en passant un bras sous le sien pour le tenir.
Nous continuâmes à marcher sous le clair de lune, dans le parc, sous les lampadaires, donnant une atmosphère paisible au lieu, seulement ponctuée par le chant des criquets, quelques lucioles voletant doucement.
« C'est si tranquille, si calme cet endroit, déclara-t-il en fermant les yeux.
- Il est 23h après tout, c'est normal, expliquai-je, est-ce que ça va mieux ?
- Oui, beaucoup. Tout va mieux dans ma vie depuis peu, lâcha-t-il, sûrement sous le coup de l'alcool.
- Tant mieux. Je suis heureux pour toi Solène, lui confiai-je sincèrement.
- Tu sais que mon pali a été incarcéré ?, reprit brusquement le blond, tout ça, c'est grâce à mon frère, à Soliès, à ma mania, à l'avocat. Et ça me fait un bien fou !
- Je suis heureux de savoir que l'avocat Mr Glems a pu vous aider lors de votre procès, déclarai-je, soulagé.
- Attends une minute... c'est toi... c'est toi Alfen qui as payé notre avocat ?, renchérit le blond, choqué par la nouvelle.
- Je... J'avoue oui...
- Pourquoi ??
- Je... il y a plusieurs raisons à cela, mais la principale d'entre elles est parce que..., chuchotai-je vers la fin, mal à l'aise.
- Parce que ?, insista le jeune homme.
- Parce que tu me plais », confessai-je brusquement.
Solène me fixa avec de grands yeux, complètement silencieux, toujours accoudé sur moi. Je souris doucement avant de secouer la tête.
« Tu... Tu n'es pas obligé de me rendre mes sentiments, lui répondis-je tout en venant tapoter affectueusement le haut de sa tête, celui-ci étant plus petit que moi.
- Attends, attends, attends Alfen... Tu, tu, tu... je te... plais ?, balbutia-t-il, sa main finissant par agripper ma manche, je te plais ??
- Bien sûr. Comment appelle-t-on ça déjà ? Un coup de foudre, je crois. Et avoir fait ta connaissance m'a donné encore plus envie de te connaître.
- Mais... cette histoire de problèmes personnels alors..., émit-il douteux.
- Oh non, non, ceci est vrai, j'ai vraiment des problèmes avec ma famille... Comment te le dire ? », soupirai-je tristement.
Je le regardai, celui-ci attendant visiblement mon explication, puis je lui avouai, la gorge nouée :
« J'ai eu un fiancé, il y a longtemps. Il s'appelait Doli. Il était... incroyable et je l'aimais tellement... J'ai fait son deuil maintenant mais... J'en veux toujours à ma famille pour ce qui lui est arrivé... Et je ne veux, à vrai dire, pas que la même chose t'arrive.
- Que lui est-il arrivé ?, me questionna le cynérien tout doucement.
- Il... Il s'est suicidé, à cause de la pression de ma famille. Je viens d'une famille riche, et selon elle, je ne dois marier que des personnes de haute société... Aujourd'hui, le concept est de plus en plus déplacé et il est rare de voir ce genre de choses, mais à l'époque... c'était plus courant... Et... Doli était fragile... il avait été abusé par sa pale, il avait perdu sa mania très jeune et il n'avait pas de frères et sœurs. Je venais tout juste de le sortir de ses problèmes... Alors... ta situation me rappelle la sienne et je... je me suis senti tellement inutile pour ne pas avoir été là pour l'aider, ignorant que ma propre famille le pousserait au suicide, je suis désolé Solène, je suis tellement désolé », finis-je par éclater en larmes, lâchant son bras de peur de lui faire mal.
Néanmoins, deux bras finirent par m'enlacer et m'attirer dans un câlin réconfortant.
« Je suis désolé de t'avoir forcé à m'avouer une telle chose, s'excusa-t-il en resserrant son étreinte.
- Je ne t'en veux pas Solène, je suis désolé de t'avoir caché certaines choses et de t'avoir menti, je-
- Non, ne t'excuse pas, tu n'as rien fait de mal, m'interrompit le jeune homme en venant prendre mon visage en coupe, tu n'y peux rien Alfen, tu n'y peux rien si sa pale a abusé de lui. Je connais cette culpabilité. Ma mania et mon frère s'en veulent aussi de n'avoir rien pu faire. Mais ce n'est pas leur faute. Tu as fait ce que tu pouvais Alfen. Grâce à un ami important, j'ai compris que ce n'était pas ma faute, et ce n'est pas la tienne s'il est mort. Tu n'es pas un monstre Alfen. Les véritables monstres sont ceux qui poussent à l'acte ou les commettent, comme les membres de ta famille ou mon pali. D'accord ? »
J'acquiesçai, laissant mes larmes couler sur mes joues, sanglotant doucement.
« Comment peux-tu tenir Solène ? », m'enquis-je, ma main venant saisir la sienne pour la caresser.
Le blond se figea quelques secondes avant de se ressaisir.
« Je... Je n'étais pas vraiment comme ça avant... C'est juste que..., sourit-il avant de lâcher un petit rire nerveux, c'est juste qu'un ami m'a harcelé pendant plusieurs mois, jour et nuit, j'exagère peut-être un peu, pour m'aider. Lorsque je me sentais mal ou que je faisais une crise, il était là, il était là pour me soutenir moralement et physiquement. Il m'a fait reprendre confiance en moi, il m'a aidé à aller mieux, il m'a fait comprendre ma valeur. Je ne sais pas ce que je serais devenu sans lui... mais je le remercie sincèrement pour tout ce qu'il a fait pour moi.
- Je peux le voir, accordai-je tout en séchant mes larmes.
- Et euh... quant à tes sentiments Alfen... Laisse-moi un peu de temps... Peut-être que si tu fais preuve de persévérance, je pourrais accepter », avoua-t-il, me lâchant et fuyant mon contact.
Les bras m'en tombèrent face à son aveu soudain et je me repris rapidement, lui courant après.
« Solène, l'interpelai-je, me plaçant devant lui, n'osant pas lui saisir la main, alors... ai-je une chance ? Me laisseras-tu une place dans ton cœur ?
- Peut-être..., répondit-il en rougissant timidement, la vraie réponse donnée par ses joues rouges.
- Alors cela me convient », conclus-je tendrement en lui tendant ma main.
Il n'hésita pas un instant et vint saisir la mienne tout en souriant délicatement, accentué par sa beauté sous la pâle clarté de la lune, semblable à une divinité.
« Et si on allait voir le lac ? C'est un peu loin mais ça doit être beau, proposa le blond.
- D'accord... », acceptai-je, me laissant guider par celui-ci, bien trop hypnotisé par son élégance naturelle.
« N'a-t-il donc aucun défaut ? Ou l'amour me rend-il aveugle ? », pensai-je, absorbé dans la contemplation de cette chevelure blonde semblable à la chaleur du soleil qui se balançait au gré de ses mouvements, de ces yeux verts qui étaient comparables aux émeraudes les plus pures qui soient, de ces mains douces et fines si fragiles et pourtant si fortes, de cette voix enchanteresse, à la fois mélodieuse et légèrement suave, de ces hanches qui-
Je secouai la tête, chassant les idées perverses qui avaient commencé à s'introduire dans mon esprit.
Solène ne serait pas prêt avant un long moment à ce genre de choses. Je prendrai mon mal en patience et attendrai le temps qu'il lui faudra. Tant pis s'il ne sera jamais prêt pour des relations, du moment qu'il acceptait ma présence à ses côtés, cela était un grand pas.
« Nous sommes arrivés et-, remarqua Solène avant de s'arrêter puis de lâcher ma main et de croiser les bras, comment tu t'es retrouvé là ?
- Haha, rit une voix connue de mes oreilles, je ne pensais pas que quiconque s'approcherait du lac à une heure aussi tardive ».
Je jetai un rapide coup d'œil à ma montre et il était en effet plus de minuit. La silhouette qui nous avait répondu se rapprocha pour se montrer sous la lumière de la lune.
« Hein ?? Patron ?? Que nous vaut le plaisir de votre visite à cette heure-ci ??, demanda Soliès en nageant vers nous.
- Hum, fis-je en me raclant la gorge, ce n'est pas volontaire-
- C'est moi qui ai insisté pour venir ici, me coupa le blond, je n'aurais jamais pensé te trouver ici !
- Comme si j'étais cantonné à la maison Solène ! Je peux bien me faire plaisir ! », se moqua-t-il affectueusement.
Solène se contenta de lever les yeux au ciel.
« Comment ça 'nous' ?, repris-je brusquement.
- Oh euh... Je ne suis pas seul évidemment, lâcha-t-il, gêné.
- Ce n'est peut-être pas l'endroit idéal pour se rencontrer patron, s'éleva une autre voix que je connaissais bien.
- Oh Orias, en effet, pas idéalement non. Et arrêtez de m'appeler patron en-dehors des heures de travail. C'est très gênant, marmonnai-je, terriblement embarrassé.
- Comme vous voudrez Alfen, répliqua Soliès en riant légèrement.
- Au fait, que faites-vous ?, s'enquit curieusement le blond.
- Un bain de minuit, Solène, déclara le cynérien enceinte, son partenaire le rejoignant, l'eau atteignant à peine au-dessus du ventre.
- Qu'est-ce que c'est ? », interrogea-t-il à nouveau.
Un silence tomba sur le lac, seulement interrompu par le doux clapotis de l'eau et le chant des criquets.
Soliès et Orias se regardèrent, ne sachant visiblement pas comment lui expliquer.
« Hum, Solène, l'appelai-je, le faisant se retourner dans ma direction, un bain de minuit consiste en une baignade sans vêtements.
- Ça t'intéresse ?, reprit soudainement le cynérien aux cheveux longs noirs.
- Euh... Je ne sais pas si..., hésita le blond d'un air penaud.
- Ce n'est pas grave. Nous allons nager, enfin, nous baigner plus loin. Et vous laisser un peu d'espace héhé », gloussa l'autre homme avant de partir d'un signe d'aurevoir.
Nous les vîmes flotter au loin, la voix de Soliès et celle d'une autre personne nous parvenant de manière distante :
« Tu n'avais pas dit que tu veillerais à chasser les malotrus ?? »
« J'ignorais qu'Alfen et Solène étaient des malotrus ( ͡° ͜ʖ ͡°) »
« OOH va te faire voir vilaine !! », s'exclama-t-il en lançant des algues à une sorte de nuage flottant.
« Mouéhéhéhé raté, t'es trop nul !! ╰(✧∇✧)╯ »
Je me concentrai vers le blond et lui proposai :
« Veux-tu tremper les pieds peut-être ? »
Il hocha la tête et enleva ses chaussures. Je lui tendis la main et nous nous mîmes à marcher autour du lac, dans la direction opposée au couple.
« Pardon, s'excusa soudainement Solène.
- Pourquoi t'excuses-tu ??, lâchai-je, surpris.
- Parce qu'on ne se baigne pas... Je... Je n'aime pas montrer mon corps... Je me trouve laid et-
- Je t'interdis de dire ça Solène, réfutai-je en m'arrêtant et en prenant son visage entre mes mains, essuyant les quelques larmes qui coulaient sur ses joues, tu es magnifique.
- N'im- n'importe quoi, balbutia-t-il d'un air confus, c'est parce que tu n'as pas vu les cicatrices sur mon corps et-
- Et quand bien même je les verrai, je te trouverai toujours aussi magnifiques, parce que j'en suis certain, je t'aime Solène. Ne doute jamais de ta beauté et de ta valeur, tu es splendide », confessai-je en l'observant droit dans ses formidables yeux verts.
À mes mots, le cynérien se mit à rougir fortement avant de détourner le regard, embarrassé. Puis, ses yeux vinrent à nouveau croiser les miens et il se pencha vers moi avant de déposer un baiser prompt sur mes lèvres.
« Toi aussi... tu me plais Alfen », me confia-t-il tout en serrant sa main dans la mienne, entrelaçant nos doigts.
Mon cœur rata plusieurs battements sous le coup de la surprise, véritablement choqué par son geste.
« Alfen... Et si nous rentrions ? Mon frère commence à s'inquiéter et il me harcèle de messages, nous n'aurons qu'à nous voir demain si tu le souhaites, m'énonça-t-il après avoir jeté un coup d'œil à son téléphone.
- Oui, bien sûr, je te ramène... Où ? », lui promis-je, encore confus par le baiser impromptu.
Le cynérien rit, amusé par ma maladresse avant que je ne comprenne mon erreur. Je l'emmenai alors sur le chemin du retour, profitant encore un peu de ce moment de paix qui nous était offert, discutant de sujets variés, de nos passions, gardant nos mains enlacées.
Ellipse
Je freinai, me garant sur le côté afin de ne pas gêner la circulation, tout de même inexistante à cette heure-ci.
« Merci de m'avoir ramené, me remercia sincèrement le blond.
- C'est bien normal. Je n'allais pas te laisser rentrer seul, lui répondis-je.
- Ce n'est pas faux », s'esclaffa-t-il.
Il ouvrit la portière et descendit du véhicule avant de se tourner vers moi et de me sourire en rougissant :
« J'ai beaucoup aimé cette soirée Alfen. Si... tu veux en faire une autre, je ne serai pas contre.
- Je serai alors ravi de pouvoir également passer une autre soirée en ton agréable compagnie, enchéris-je sincèrement.
- Flatteur..., bougonna-t-il en faisant faussement la moue.
- C'est ce que je sais faire de mieux, renchéris-je.
- Oh merveilleux !, s'exclama Solène en levant les yeux au ciel, amusé par ma réplique.
- Que dirais-tu d'une sortie ce midi ? Afin que je te flatte encore, offris-je.
- Ce midi ? Oh, il est en effet 1h du matin. Ce sera avec plaisir alors, à ce midi dans ce cas, me souhaita-t-il timidement.
- À ce midi, passe une bonne nuit, lui souhaitai-je également.
- Bonne nuit à toi aussi », fit-il avant de fermer la portière et de se diriger vers le domicile de son frère, me faisant un signe d'aurevoir.
J'attendis qu'il entre avant de démarrer la voiture et de rentrer chez moi. Une fois arrivé à la maison, j'entrai à l'intérieur, desserrai ma cravate et me laissai tomber sur le canapé, fatigué mais heureux de ma journée. Je me penchai soudainement et sortis alors de mon portefeuille un papier tout froissé. Je le dépliai, caressant soigneusement en réalité ce qui était une lettre.
Quelques larmes vinrent s'écraser sur la feuille.
« Regarde Doli, murmurai-je, j'ai réussi à faire ce que tu m'as demandé... J'ai réussi à tomber à nouveau amoureux... Solène et toi vous ressemblez tellement. Peut-être est-il ta réincarnation ? Je ne sais pas... Mais... J'espère sinon que tu ne m'en voudras pas d'aimer un autre que toi Doli... Je suis désolé... mais merci... merci pour tout ce que tu m'as apporté, merci Doli ».
Je me levai et déposai la lettre devant une photo de deux personnes, l'une aux cheveux argentés, l'autre aux cheveux blonds. Puis je me tournai et partis me coucher, un nouveau lendemain plein d'espoir m'attendant.
La lettre resta là, esseulée, devant ce portrait aux souvenirs heureux.
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*Il est intéressant de noter qu'Alfen utilise le terme « mère » en cynérien et non « maman ». Idem pour son père.
(1) Est-ce que certains se rappellent de ce bar héhé ?
BONJOUUUUR. En effet, ce chapitre est loooooooooong. Et je m'en excuse XD. Mais j'avais besoin de toute cette longueur pour développer le personnage d'Alfen mais aussi celui complexe de Solène. À la base, il était censé comporter d'autres scènes que je n'aurais pas ajoutées finalement (comme celle du bain de minuit, que je ferai plus tard hihi).
Je n'ai pas grand-chose à ajouter en fait. Que pensez-vous d'Alfen ? De Doli ? C'est assez triste en effet... Je précise tout de même que tout est du point de vue d'Alfen, qui sait, sa famille n'est peut-être pas si horrible ?
Le prochain chapitre... est sur Solène... Je m'excuse d'avance, il risque d'être dur à traiter...
J'espère que celui-ci vous a plu en tout cas avec sa fin douce-amère ! (J'espère que vous comprenez bien qu'Alfen aime Solène, mais qu'il n'oubliera jamais Doli non plus).
Passez alors une bonne soirée !!
FF
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