𝐒𝐘𝐌𝐏𝐇𝐎𝐍𝐈𝐄 𝐃𝐄 𝐍𝐎.𝟖
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chapitre trente-trois —— La Rumeur
« L'amour s'appelle aussi sacrifice. »

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Les yeux d'Aika restaient rivés sur l'étrange radio qui flottait aux côtés de Tsukasa. Elle observait la scène, sans un mot, incapable de savoir ce que le garçon comptait faire.

Son cœur battait la chamade, la panique prenait lentement le dessus, alors que sa peur grandissait au fur et à mesure que les secondes défilaient. Mais Aika ne devait pas y penser. Elle ne devait pas se laisser porter par ses émotions, se laisser submerger. Elle devait se battre.

— Regarde, j'ai ramené ce jouet spécialement pour toi ! s'exclama Tsukasa d'un air enjoué.

— Qu'est-ce que tu comptes faire avec cette radio ? interrogea Aika, la colère prenant de plus en plus le dessus sur sa peur. Tu ne vas quand même pas me...

Un éclair de lucidité venait de frapper la jeune fille. La terreur s'empara immédiatement d'elle, ses membres tremblaient, le sol menaçait de se dérober sous ses pieds. Elle écarquilla grand les yeux de stupeur, en comprenant ce que l'esprit comptait faire :

Il allait lui changer sa rumeur.

Avec une douceur extrême, un geste empli de délicatesse, Tsukasa tourna l'un des nombreux boutons de la radio flottante. Sans un mot, il observa le Huitième Mystère prise de court. Ses lèvres s'étirèrent en un fin sourire, alors qu'il prit enfin la parole après ce long moment de silence :

— Sakura, tu peux y aller !

Le sang d'Aika se figea dans ses veines. Non, elle allait être transformée, elle devait absolument éviter ça ! Alors qu'elle allait se jeter sur Tsukasa, la voix douce d'une jeune fille résonna dans les lieux. Immédiatement, elle eut l'effet d'un blocage pour Aika : elle ne pouvait plus bouger d'un centimètre.

Ses pieds étaient comme ancrés au sol. Elle ne pouvait plus faire le moindre geste, même avec un ultime effort.

— Connaissez-vous la rumeur de la chanteuse aux yeux crevés ?

— Non ! Non ! Arrête ça, Tsukasa ! supplia Aika, les larmes aux yeux. Ne me transforme pas, je ne veux pas blesser quelqu'un !

— Alors, tu accepterais que je réalise ton souhait ? demanda l'intéressé, intrigué.

La gorge de l'adolescente se serra à ces paroles. Son vœu le plus cher ? Est-ce que ce Tsukasa pourrait vraiment le réaliser ? Mais quelle était la contrepartie ? Aika la jugeait bien trop grande, mais avait-elle réellement le choix à cet instant ?

Elle ne pouvait pas laisser Tsukasa et cette étrange fille de la radio la transformer en un monstre qui terroriserait et tuerait les élèves. Il était impensable pour Aika, elle préférait encore mourir que de tuer un innocent.

Pourtant, le doute persistait en elle, grandissait. Le temps était compté. Elle devait faire un choix au plus vite.

Hanako... Qu'est-ce que je devrais faire ? se demanda Aika, le cœur serré de chagrin. Que dois-je faire pour protéger ceux que j'aime ?

Elle ne savait que faire. Elle ne savait pas quel choix faire. En avait-elle réellement ? Si elle ne voulait pas se transformer en tueuse, elle devait absolument se faire réaliser son souhait le plus cher par Tsukasa.

Mais... la chose ou la personne qu'elle aimait le plus allait être pris par Tsukasa, tuée de toute évidence. Et cette personne était sans aucun doute Amane. Il était la personne et la chose qu'Aika tenait le plus dans sa vie.

— Alors ? Que veux-tu faire ? insista Tsukasa d'un air enjoué. Je te conseille de choisir le souhait ! C'est vraiment moins douloureux.

Aika lui jeta un regard noir.

— Si j'ai bien compris, tu réalises mon souhait, en échange de la chose que j'aime le plus au monde, résuma-t-elle auprès du garçon.

— Exact ! Alors ? Marché conclu ?

Le sourire de Tsukasa se faisait de plus en plus grand, alors que la petite blonde serra rageusement les poings. Ce sentiment d'impuissance l'envahissait, la rongeait de l'intérieur. Elle ne pouvait rien faire dans cette situation, et cela la rendait folle de rage.

Lentement, la lumière dorée autour d'elle s'éteignit, se dissipa dans l'air. Sa force s'évanouit, pour laisser place à une immense fatigue qui la fit tituber. La détermination et ses espoirs s'effaçaient doucement. Aika était face à la réalité.

La vive lueur dans ses yeux dorés s'affaiblissait, se fanait et devenait terne. Elle se consumait, s'effaçait dans l'air, pour laisser place à des yeux gris, remplis de larmes et de rage.

Aika se sentait lourde, incapable de faire le moindre mouvement. Parler lui coûtait un ultime effort, ses jambes tenaient bon, ne fléchissaient pas. La jeune fille se tenait face à Tsukasa, qui lui, s'amusait de ce spectacle qu'elle lui offrait à contrecœur.

— Tsukasa, pour rien au monde, je te demanderais de me faire exaucer mon souhait le plus cher ! s'exclama Aika.

— Alors, tu préfères être transformée ? s'étonna-t-il, visiblement déçu.

— Si je te demande mon souhait, tu prendras la vie d'Amane !

— Alors, tu vas laisser mourir des innocents, juste parce que tu veux protéger Amane ?

— Qui te dis que je vais les tuer ?

Tsukasa éclata de rire à cette réponse. Aika, elle ne riait pas, même si l'envie lui prenait fortement. Elle avait un plan. Un plan génial et infaillible. C'était sa seule solution possible.

— C'est bien dommage, moi qui pensais que j'allais réaliser ton souhait, je voulais tellement ! se plaignit l'adolescent. Mais bon, tant pis ! Sakura, continue !

La radio émit un grésillement, signe que la jeune fille allait poursuivre.

— Connaissez-vous la rumeur de la violoniste aux yeux crevés ? Si vous entendez une jeune fille jouer une longue berceuse au violon, dans les couloirs, il est déjà trop tard. Elle apparaîtra derrière vous dans le plus grand des silences. Puis, au creux de votre oreille, elle vous murmurera avec une douceur inégalable : "Reconnais-tu cette mélodie ?". Vous resterez paralysé, incapable de lui mentir. Si vous ne reconnaissez pas la mélodie, la chanteuse s'énervera et vous transpercera les yeux avec son archet. Puis, pour que vous lui ressemblez encore plus, elle vous arrachera les yeux.

Un second grésillement fit comprendre à Aika que c'était terminé. Mais en réalité, ce n'était que le début.

— Allez, je te laisse Aika, finit par dire Tsukasa en faisant disparaître la radio. Je me suis bien amusé avec toi, même si ça n'a pas duré très longtemps !

Immédiatement, après ces mots, une incroyable douleur s'empara du Huitième Mystère. Ses membres semblaient se détruire dans son corps, se consumer. Aika hurla de douleur, incapable de bouger ou de faire quoique ce soit pour l'apaiser. Mais même son hurlement ne suffisait pas à exprimer tout le mal qu'elle ressentait. Aucun mot n'aurait pu le montrer.

Sans qu'elle ne puisse se contrôler, Aika se tordit de douleur dans tous les sens. Elle se défigurait, se brisait elle-même ses propres os. Un second hurlement retentit tel un écho. Il résonna au plus profond du Mystère, lui brisa le cœur, la fit frissonner d'effroi. Elle avait peur, peur d'elle-même.

Un troisième cri de douleur vint lui couper le souffle, le vider ses poumons en feux. Les yeux d'Aika se détachaient de son visage et creusaient deux énormes trous à la place. Ils ressortaient en sang, puis tombaient au sol. La vue du Mystère se brouilla, devint entièrement noir, sans une seule part de clarté où elle pourrait se raccrocher.

Elle se transformait en la violoniste aux yeux crevés. Et son pire cauchemar se réalisait : elle redevenait aveugle.

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CHAPITRE 33 TERMINÉ
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