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𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟕𝟕

𖤓

ET DANS LES LARMES DE CEUX QUI
VIVENT, JE LAVE LE SANG DES
▬▬ MARTYRS ▬▬





CH126
aucun spoiler








             Douleur. Tout n’était que douleur.

             Levi Ackerman frissonna. Même s’il sentait le doux contact d’une étoffe sur son torse dénudé, l’air se faisait particulièrement frais et il en avait le chair de poule. D’autant plus qu’une vive douleur le saisissait à différents endroits de son corps. Les mains et le visage, principalement.

             Les paupières closes, il demeura ainsi quelques instants. Malgré son long sommeil, son esprit était encore quelque peu embrumé. Il eut le temps d’inspirer profondément l’oxygène alentour et de deviner à son parfum, pétrichor, qu’il se trouvait dans une forêt avant de comprendre. Car cette même fragrance était l’une des choses qu’Edward, son défunt ami, affectionnait le plus.

             Edward. Emeraude. Instinct. Hurlement. Danger. Explosion. Il se souvenait maintenant. Et ce fut pour cette raison précise que, ignorant la brûlure froide au niveau de la base de deux de ses doigts ainsi que la chaude et dense sensation de tissu enroulant son visage, il se redressa vivement.

             Il lui fallait savoir. Juste avant la détonation, il avait tout juste eu le temps de voir que la jeune femme s’était approchée de sa position pour le prévenir du danger imminent. Beaucoup trop approchée. A un point tel qu’il avait saisi que ses blessures seraient, dans le meilleur des cas, irréversibles.

             Dans l’ultime instant précédant la déflagration, il avait tout juste eu le temps de se saisir de son carquois où ses sabres reposaient pour se protéger du souffle le mieux possible. Et, même s’il faisait confiance à Emeraude pour avoir adopté une posture défensive par réflexe, il était terrifié à l’idée que cela n’est pas suffi.

             S’appuyant difficilement sur son avant-bras droit, il tira sur l’étoffe le recouvrant de la main gauche afin de se redresser. Son esprit, bien qu’encore embrumé, lui laissa à ce moment-là voire le paysage alentour. L’obscurité lui montrait qu’il faisait nuit et l’herbe sous ses fesses ou encore les larges troncs devant lui révélaient qu’il se trouvait en forêt.

             Il n’en fut pas vraiment surpris, le lieu de la déflagration s’étant situé non loin d’un bosquet.

             Il cligna faiblement des yeux et remarqua des débris de bois dans l’herbe, comme balancés en vrac parmi la verdure. De plus, diverses bruits secs et répétitifs semblaient lui indiquer la présence d’une personne à ses côtés. Il n’en fut pas surpris. Aucun sang ne le recouvrait et il avait été placé dans un lit de fortune. Quelqu’un avait dû le trouver.

             Il pria intérieurement pour que cette même personne se soit occupée d’Emeraude.

— Rallonges-toi, trou du cul, retentit soudainement une voix sèche dans l’obscurité.

             Aussitôt, un bruit d’étoffe s’en suivit. Une personne non loin de lui, là où retentissaient les divers bruits, venait de se retourner. Et celle-ci ne tarda pas à décliner son identité en faisant simplement retentir sa voix :

— Levi !

             Si le fait d’entendre successivement les voix de Bosuard et Hanji lui mit un peu de baume au cœur, cela ne suffit pas à le détourner de sa tâche initiale. Son œil droit se mue quelque peu dans son orbite, cherchant l’être aimé des yeux.

             Devant lui, légèrement sur la droite, la silhouette maigrichonne de la scientifique s’attelait autour d’une construction de bois. Ses mains manipulaient une planche fixée à deux roues conséquentes tandis que son visage tordu de surprise le fixait.

             Il fut quelque peu étonné de la voir ainsi. Il n’était pas habituel pour son amie de se comporter de la sorte. Les gouttes de sueur sur son front, son sourcil haussé sous un mélange de panique et de soulagement, ses doigts quelques peu tremblants autour de morceaux de bois. La fougueuse Hanji semblait avoir disparu.

             Emportée par la guerre.

             Il n’eut le temps d’y penser bien longtemps. A côté d’elle, un peu plus près du feu qu’il devinait à sa droite de par la chaleur chatouillant sa peau et la façon qu’il avait d’illuminer le duo, Dan et Bosuard le regardaient aussi, moins déchiffrables mais lui laissant tout de même une compréhension assez nette de leurs sentiments.

             Le premier, pinçant ses lèvres pour ne rien en montrer, poussa un faible soupir de soulagement. Accroupi sur l’herbe mouillée, il avait enroulé ses bras tatoués autour de ses jambes qu’il gardait pressées contre lui pour se protéger du froid de la nuit. Aussitôt, Levi remarqua des tâches rougeâtres parmi les dessins à l’encre noir gravés dans sa peau.

             Son cœur rata un battement.

             L’adolescente à leurs côtés avait noués ses box braids en un habituel chignon imposant. Mais dans ses nattes se trouvaient quelques feuilles et brins d’herbes laissant deviner un effort particulier exécuté en forêt. Et, à en juger par le sang sur les avant-bras du métissé et le fait qu’Emeraude ne se trouvait pas avec eux, il fit très vite un raccourci.

             Sa gorge se fit sèche et ses doigts se mirent à trembler sous leurs bandages. Un fourmillement particulièrement douloureux le prit et un spasme de douleur saisit tout son corps. Il avait mal. Très mal.

             Mais cette souffrance physique n’était rien comparée au vide qui venait de se créer en lui.

             Son œil s’agita dans son orbite à mesure que des larmes venait l’inonder. Sous les regards surpris de ses trois amis, il plia faiblement le bras sur lequel il se soutenait, comme s’il était devenu trop compliqué pour lui de se maintenir debout. Et c’était aujourd’hui effectivement le cas.

             En face de lui, aucun ne sut tout de suite comment réagir. Jamais ils n’avaient vu le caporal-chef dans un tel état, même à la mort d’Erwin. Malgré ses épais bandages couvrant la majeure partie de son visage, son œil mouillé laissait voir une envie irrésistible de pleurer. Et il s’agissait là de quelque chose qu’il ne faisait jamais.

             Les spasmes de son corps, eux, laissaient penser à une maladie. Et, lorsque sa voix retentit soudain, faible et déchirée, ils comprirent que celle-ci portait le nom de tristesse. Ou rage.

— Il est où… Ce fumier… De bestial…

             Il fallait qu’il le retrouve. Une dense chaleur venait de naitre dans sa poitrine, à même d’endiguer n’importe quelle souffrance se voulant paralysante. Ses membres ne tremblaient plus que sous l’effet de la rage et il suffoquait presque tant la chaleur de sa colère était dense. Il n’était plus le même.

             Tout cela était la faute de cette immondice. La mort d’Erwin. Les blessures d’Emeraude. A vrai dire, il ne savait réellement si elle était décédée et, à l’instar des quatre ans passés loin d’elle, se refuserait à le croire jusqu’à avoir personnellement tenu son corps froid dans ses bras. Mais il sentait, au plus profond de lui, une souffrance autre que la sienne. Oui. Comme s’ils étaient liés, il devinait la douleur de la femme.

             Et l’idée qu’elle souffre lui était insupportable.

— Reste allongé ! retentit soudain la voix d’Hanji tandis que des mains fines à la poigne ferme faisait pression sur ses épaules. Sieg est parti avec les pro-jäger en direction de Shiganshina. Une demi-journée s’est écoulée.

             Malgré les bonnes intentions de son amie et sa faiblesse physique, il n’abdiqua pas sous la pression de sa paume. Il lui fallait rester debout. Il ne se recoucherait pas tant qu’il n’aurait pas vu Emeraude.

             Même plus. Il lui avait fait une promesse, celle disant que s’ils ne rentraient pas ensemble, ils ne rentreraient pas tout court. Alors, si elle s’était avisée de pousser son dernier soupir, il ne dormirait pas jusqu’à avoir accompli la dernière mission d’Erwin. Puis, il irait les rejoindre, elle et lui, d’un simple thé empoisonné.

             Le soldat qu’il était se battrait jusqu’au bout. Mais le cœur dans sa poitrine, lui, refuserait de le faire dans un monde qu’elle n’habitait plus.

— Mais qu’est-ce qui s’est passé ? demanda la scientifique.

             Elle avait abandonné l’idée de le recoucher. Cet homme était têtu. Et, quand les choses lui tenaient vraiment à cœur, encore plus que la femme dont il s’était épris. Alors, sachant en plus qu’elle allait devoir le mettre au courant tôt ou tard de ce qui était arrivé à cette dernière, elle préféra le laisser quelques instants libre de ses mouvements.

             Car elle savait que la peine le paralyserait bientôt.

— J’ai merdé, dit-il simplement d’une voix faible tandis que les deux autres se rapprochaient lentement. J’avais pas capté que cet enfoiré était si déterminé qu’il ne reculerait pas devant la mort. Une fois de plus, il m’a échappé.

             Sa voix était saccadée, son souffle se faisant rare à cause de ses blessures. L’une d’entre elles attira d’ailleurs son attention. A sa main droite, son index et majeur avaient été sectionné. Aucune émotion particulière le prit à cette vision.

             A vrai dire, ses pensées convergeaient toutes en un point que, ni la perte de ces deux doigts, ni celle de son œil droit ne parvint à le faire s’en détourner. Emeraude. Où était-elle et comment allait-elle ?

— Je comprends que tu t’en veuilles, mais à présent…, commença la voix de Dan derrière Hanji.

             Cette dernière se trouvait assise si proche de son lit de fortune que son genou touchait le matelas. Bosuard et l’homme, de leurs côtés, se trouvaient légèrement plus en retrait. Levi voyait leur silhouette par-dessus la tête de la scientifique.

— Se planquer dans les bois…, le coupa-t-il simplement, …à quoi ça nous avancerait ?

             La tatoué afficha une moue embarrassée en constatant que le caporal avait perçu ses propos tenus avec les deux autres durant son sommeil. Mais le noiraud n’insista pas sur ce point. Encore et toujours, il n’avait de pensées que pour elle.

             Un long soupir las et attristé le prit. Ses mains tremblèrent légèrement sous ses bandages, attirant l’attention du trio. Il était rare de voir Levi montrer la moindre émotion. Non pas qu’il n’en avait pas ou qu’il les gardait enfouies, simplement qu’il peinait à les manifester aux yeux de tous.

             Alors, si ses membres se voyaient soudain pris de spasmes, cela signifiait que le torrent de sentiments l’ayant assailli était si brutal qu’il ne pouvait en contrôler les effets sur son corps. Et en effet, une déchirure profonde semblait s’être créée en lui.

— Elle m’avait prévenu, dit-il simplement.

             Un peu intrigués par cette réflexion qu’il avait laissé filer, la tête basse regardant ses mains bandées, tous froncèrent les sourcils. Bosuard sembla comprendre de quoi il parlait car elle s’autorisa un coup d’œil en direction du feu, hors du champ de vision du caporal.

             Mais il ne remarqua pas celui-ci, son esprit embrumé par le souvenir des secondes ayant précédées l’explosion. Jamais il n’oublierait l’expression sur le visage d’Emeraude lorsqu’elle s’était élancée en sa direction.

— Elle m’a dit que la bombe allait exploser, qu’il fallait que je m’écarte et elle s’était elle-même écartée.

             Son cœur rata un battement. Autour de lui, plus personne ne disait mot. Ils savaient pertinemment de qui il parlait. Et aborder ce sujet risquerait d’achever ses blessures déjà conséquentes.

             Il eut un autre soupir. Quelque part, il la détestait d’avoir eu ce tout dernier réflexe. Ce stupide geste.

— Elle a ressenti que l’explosion allait survenir alors qu’elle était assez loin, en sécurité.

             Ses épaules s’affaissèrent et ses entrailles se tordirent. Un grand vide venait de se creuser en lui tandis qu’un poids qu’il ne connaissait que trop bien faisait pression sur ses épaules.

             La culpabilité.

— Alors pourquoi cette imbécile écervelée a-t-elle eut pour dernier réflexe de se précipiter vers moi pour me protéger ?

             Hanji, qui n’avait pas quitté son œil valide du visage de Levi jusqu’à maintenant, tourna brutalement la tête vers sa précédente occupation. Il était méconnaissable. La voix et les mains tremblante, l’intégralité de son visage à la seule exception de son iris droite étant dissimulée sous des bandages et sa tête irrémédiablement baissée vers le bas. Le soldat semblait avoir disparu.

             Cette vision était douloureuse. Très douloureuse. A un point tel qu’elle hésita à le planter, là, et rejoindre les planches de bois qu’elle assemblait avant son réveil. Mais ce n’était pas son genre. Alors, quand bien même son cœur se serrait face à un spectacle si déroutant, elle ne bougea point et se contenta de rester devant lui.

             De leur côté, Bosuard et Dan ne dirent mot. Du moins, pas tout de suite. Ils savaient pertinemment les raisons qui avaient poussées Emeraude à sortir du périmètre dans lequel elle était en sécurité pour s’élancer vers le caporal. Quand bien même elle n’aurait jamais eu le temps de le rejoindre et le tirer loin de la déflagration et qu’elle le savait.

             A vrai dire, l’adolescente sentait au plus profond d’elle-même que ce n’était pas seulement par désir de sauver le noiraud qu’elle avait fait ce geste. Non. Il y avait aussi une partie d’elle, une voix qu’elle tentait d’ignorer mais qui la taraudait, une personne totalement éprise de l’homme qui, face à la possibilité si accrue de le voir mourir, avait décidé de le rejoindre dans cette dernière ligne droite.

             Oui. Si la jeune femme avait d’abord tenté d’aider Levi, elle s’était vite rendue compte qu’elle ne parviendrait pas à le sauver, qu’il était trop tard. Et la fin de sa course vers l’inévitable n’avait été mue que par le désir qu’ils franchissent la frontière céleste ensemble.

             Ce fut pour cette raison précise que l’adolescente détesta encore plus son amie. Putain de déserteuse de merde, songea-t-elle avec un spasme de douleur sous le regard attentif de Dan.

             Elle l’avait tant pleurée en apprenant sa mort que la revoir ne lui avait pas provoqué mille et un rires de joie, seulement la sensation désagréable d’une lame plantée au travers de ses omoplates. Pourtant, elle l’aimait et le savait. Alors jamais elle n’avait songé que sa rancœur envers Emeraude s’éterniserait. Le temps ferait son affaire et leur amitié reviendrait. Telles étaient la façon dont les choses auraient du se dérouler.

             Mais les graines avaient rejoint le bas du sablier et, le cœur gros, elle constatait encore une fois que son amie avait déserté. Même si son corps demeurait à leur côté, allongé près du feu. Espèce de lâche, songea-t-elle tandis qu’un sanglot serrait sa gorge et des larmes imbibaient son champ de vision où ne se trouvait que la jeune femme inconsciente.

— Bosuard et moi n’avons pas pris de vin donc on ne s’est pas transformé mais on s’est vite retrouvés acculés par des titans. Même si on s’en est débarrassé, expliqua Dan à voix basse, on ne vous a retrouvé que lorsqu’une explosion a retentit en dehors de la forêt.

             L’homme déglutit péniblement, ses yeux rivés sur les mains du caporal. Il était incapable de le regarder dans les yeux. Ils auraient dû se déplacer plus vite. Beaucoup plus vite.

— Lorsque nous avons fini par trouver l’endroit précis de l’explosion et son corps, elle avait déjà perdu énormément de sang et…

             Sa phrase mourut dans sa gorge étranglée par un sanglot. Levi n’était pas le seul à se sentir coupable. Afin d’économiser du gaz au cas où d’autres titans les attaqueraient, lui et Bosuard avaient fait le choix de traverser la forêt à pied jusqu’à l’explosion. Et le trajet qu’ils auraient pu faire en une dizaine de minutes leur avait donc pris plus d’une heure.

             Lorsqu’ils avaient plus tard déboulé dans la clairière parsemée d’herbes brûlées et débris engloutis sous la pluie de tantôt, leurs yeux n’avaient pas tardé à se poser sur une masse noire derrière le ruisseau. Et, même s’ils savaient pertinemment qu’il était trop tard et que trop de temps les séparait du moment de l’explosion, ils s’étaient élancés en direction du corps. Pleins d’espoir.

             Hanji, entendant dans la voix de Dan qu’il n’était plus capable de prononcer le moindre mot, se décida à prendre le relais.

— Ses bons réflexes l’ont sauvée. Ou du moins, ont réduits ses chances de mourir sur le coup.

             La pupille de Levi se dilata et il releva soudainement la tête. « Sauvée. » Cela signifierait qu’elle était en vie ? La cadence de ses battements de cœur augmenta drastiquement et, ignorant les ordres de son amie sur le fait de bouger le moins possible, il se retourna soudainement pour la chercher du regard.

             Un douloureux déchirement transperça son corps de part et d’autre à ce geste. Son dos lui donna la sensation de s’être fait broyer, ses mains semblaient percées de milles aiguilles et ses jambes n’étaient plus que des poids le maintenant immobile. Mais il ne s’en préoccupa point.

             Son œil venait de s’écarquiller et, ignorant Hanji qui venait s’était redressée et tendait la main vers ses épaules pour le maintenir en place, il mut son bras zébré de cicatrices devant lui. Elle était là. A côté du feu. Le visage inerte et le corps immobile. Mais elle était là. En face de lui. Il reconnaissait les formes de son corps, même à une dizaine de mètres.

             Oui, ils identifiaient aisément la courbure de ses traits, l’endroit exacte où se trouvaient ses yeux endormis et la façon qu’avait son nez de se dresser sur ce visage qu’il aimait tant. Ce fière posture sublimée par les flammes projetant leurs lueurs dansantes sur sa peau.

             La scientifique, qui s’apprêtait à le saisir, s’arrêta brutalement dans son geste. Sa main se referma dans le vite et ses doigts se firent tremblants à mesure que sa vue devenait floue. Une larme vint bientôt rouler sur sa joue. Comment lui dire ?

             Soudain, alors que le caporal venait de s’allonger à plat ventre et tendait son premier bras pour se trainer vers le corps, une paire de bottes vint se planter dans son champ de vision. La taille des pieds lui suffit à deviner l’identité de la personne face à lui qui l’empêchait d’avancer.

             Bosuard semblait déterminée. A un point qu’il n’avait encore jamais vu. Elle leva sans vergogne la semelle de sa botte qu’elle orienta devant le visage de l’homme, semblant le menacer ses chaussures boueuses. Il tourna alors la tête avec un soupir pour l’éviter, ne songeant même pas à hurler sur celle qui se permettait une telle action à son encontre.

             Après tout, il s’agissait d’Emeraude. Et rien ne comptait plus pour lui maintenant que de la rejoindre. Pas même une petite insolente dans ce genre.

             Mais l’adolescente l’arrêta de nouveau. Seulement cette fois-ci, il ne lui fallut qu’une phrase. Brève, déclarée d’un ton cassant et presque dénué de tout intérêt. Quelques simples mots qui figèrent le monde.

— Elle n’est pas vivante, Levi. Arrête-toi maintenant.

             Ses muscles se figèrent et il cessa immédiatement de lutter. Son avant-bras maintenant auparavant le poids de son buste sembla se briser et sa tête heurta de plein fouet le sol. Mais il ne se préoccupa point de la douleur. Pas plus qu’il ne s’arrêta sur les insectes et autres saletés qui grimpaient maintenant sur ses bandages.

             A vrai dire, le vide qui venait de se créer en lui aspira brutalement tout ce pour quoi il s’était toujours évertué de se battre. La guerre. L’Humanité. Le poing sur le cœur. Les ailes de la liberté. Les martyrs. Même la dernière promesse d’Erwin. Tout s’envola brutalement.

             Les spasmes de son corps cessèrent subitement et même sa pupille demeura fixe. Dan le regarda douloureusement. Là, allongé dans la saleté, aussi inerte qu’un cadavre et abandonné de toute envie de se battre, il était méconnaissable. Comme si, en perdant Emeraude, il venait à l’instant de perdre toute attache à son essence même.

             Le vaillant soldat impassible que l’Humanité avait toujours connu n’était plus, disparu dans le souffle de celle à qui il avait pourtant interdit de devenir une martyr.

             Sa réaction avait été immédiate, presque instantanée. Tant et si bien que Bosuard avait à peine eut le temps de le regarder s’effondrer avant de réaliser qu’il ne bougeait plus. Son dernier lien à la vie. Voilà ce qu’elle avait été. Et ce qui n’était plus.

             Il était sans être. Son cœur battait à peine dans le vide immense qu’était devenu sa poitrine, son sang courait dans ses veines sans aucun but, son cerveau semblait s’être lui-même assoupi pour toujours et il demeurait là, comme s’il ne l’était plus. Frappé de stupeur. Au sol pour la première fois de son existence.

             On eut dit que son âme s’était retirée de son corps. Tel un fragment de lui fuyant la réalité afin qu’elle ne soit plus. Mais un chatouillement particulièrement glacé au niveau de ses entrailles le rappela soudainement à lui puis, comme venu du plus profond de son être, la voix d’Erwin résonna dans sa boîte crânienne.

             Un simple souvenir qui posa les mots sur cet état de sidération.

— Lors du décès d’un proche, la douleur peut être trop dure pour certains qui entrent dans une phase plus ou moins intense qui s’appelle le déni.

             Le déni. Ce monstre persistant.

             Alors c’est ça, ce que tu as ressenti durant tout ce temps ? Ce vide immense, cette impression soudaine de ne plus être ? Une douleur atroce mais pourtant sourde au plus profond de tes entrailles ? Des spasmes tus qui parviennent tout de même à ébranler l’intégralité de ton être ? se dit-il sans parvenir à faire le moindre geste.

             Là, une première sensation lui vint. Depuis qu’il s’était laissé choir au sol sans ne rien ressentir de la douleur de l’impact, tout s’était tu autour de lui. La sensation du vent sur ses peu de centimètres de peau exposés, le parfum délicat de la forêt aux alentours, le sol en-dessous de lui pressant son torse et sa joue ou même le goût métallique du sang dans sa bouche. Tout avait disparu.

             Mais la caresse douloureuse de la larme qui coula soudainement de son œil valide jusqu’à sa tempe, elle, s’insinua en lui de sorte à le marquer de façon irréversible.

— Elle n’est pas morte non plus, résonna une voix derrière lui. A vrai dire, je n’ai encore jamais vu cela.

             Là, comme si cette simple phrase avait suffi à lui redonner un peu d’énergie, ses mains furent prises de soudain spasmes. Et, même s’il ne changea rien de sa position, il reprit peu à peu conscience du monde l’entourant.

             Le sol se pressant douloureusement sur son torse, les sons stridents vrillant ses tympans, les résidus chimiques des bandages s’infiltrant dans sa bouche, l’odeur âcre du sang envahissant ses narines et le corps d’Emeraude, au loin, qu’il ne voyait que peu à cause des larmes et l’obscurité. Tout était là sans l’être.

             Jusqu’à ce qu’elle le quitte, il ne s’était jamais rendu compte d’à quel point ce monde était hideux. Ou plutôt, qu’il n’avait su être beau qu’en sa présence.

— Elle est entre les deux, dans un endroit que je ne peux pas atteindre, poursuivit la scientifique sans un regard pour Levi, profondément peinée par ses propres mots. Même si elle n’est pas un titan, ça ressemble fortement au chemin.

             Elle poussa un soupir. Cela signifiait que tout ne dépendait que d’Emeraude. Hors du temps, de la mort ou de la vie, postée à la frontière entre les deux. La jeune femme devait faire un choix. Rejoindre ceux lui manquant tant ou l’enfer qu’était devenu ce monde. Elle laissa ses épaules s’abaisser.

             Je suis terrorisée car je te connais assez pour savoir ce que tu vas faire, songea-t-elle en regardant son corps inconscient emmitouflé dans des linges illuminés par le feu, et tu mérites tellement mieux que cette vie-là. Elle détourna ensuite le regard, ne pouvant supporter plus longtemps ce spectacle.

             Soudain, les tirant tous de leurs réflexions attristées, un rire retentit. Abasourdis, ils se tournèrent d’un même mouvement vers Levi qui, encore allongé dans la crasse, avait laissé filer ce son au travers de ses bandages.

             Mais rien dans cet éclat n’indiquait un état d’alacrité. A vrai dire, si les trois personnes avec lui s’étaient autant raidis à l’écoute de cette musique, ce n’était que parce qu’ils n’avaient jamais entendu de symphonie plus triste que ce son. Comme un verre brisé ou un cri de détresse. Moins mélodieux. Plus douloureux.

             Une autre larme coula depuis l’œil du caporal.

— Le plus drôle dans tout ça…

             Ses paupières se fermèrent. Il ne pouvait plus regarder en sa direction. Ce spectacle était trop douloureux. Mais il ne parvenait pas non plus à tourner la tête, affaibli par la simple idée qu’elle n’était plus.

             Alors, d’une voix cassée, il termina sa phrase sans ne rien voir de la réaction attristée de ses interlocuteurs.











— …C’est que je venais tout juste de comprendre que je l’aimais.

 
















chapitre un peu tristounet (très) mais je pense que ceux de demain et après-demain vous réconforteront

par contre celui d'après après-demain...

quoi qu'il en soit, pour celles et ceux se demandant
"Mais où est-ce qu'on en est dans l'histoire ?"

la fin du tome 1 sera le chapitre 86 qui marquera l'épilogue

par rapport à l'histoire d'Isayama, le chapitre 138 correspond au 84 pour cette fiction et les deux derniers sont inventés par mes soins

pour les personnes se demandant :
"Mais du coup le tome 2 se passe après ?"

et bien...

mystère mystère

(à force de lâcher des petits phrases comme ça je vais spoiler toute l'intrigue je me saoule moi-même)

allez un dernier indice ?

il sera juste ici dans l'espace commentaire

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